Brigade des mœurs (2) – Zob in club

Lorsqu’il vit le mec sortir de la pièce en se rajustant d’un air satisfait, JB se dit qu’il allait enfin pouvoir tirer son coup.

Ca faisait un bon bout de temps qu’il trainait dans la boite sans avoir rien pu faire et il commençait à avoir les couilles douloureuses à force de se secouer la nouille sans résultat.
Il avait bien tenté quelques approches mais à chaque fois, il s’était vu opposer une fin de non recevoir par la nana ou son mec.
Il savait bien que son physique ingrat ne l’avantageait pas. C’est d’ailleurs pour ça qu’il privilégiait ce genre de soirées où les filles ne sont, en général, pas trop regardantes. Mais ce soir, ça avait été la misère !

Il était repassé un nombre incalculable de fois devant cette chambre. Mais à chaque passage, il avait pu constater que la nénette était accaparée par un nombre déjà largement suffisant de soupirants. Elle devait être sacrément bonne !

Jusqu’à maintenant.

Le mec qui venait de sortir avait laissé le champ libre. La fille était toute seule. On voyait bien que la soirée tirait à sa fin, les couloirs se dépeuplaient.
Son mec devait être allé boire un coup au bar. A moins qu’elle soit venue seule mais cela semblait peu probable.

En s’approchant, il s’aperçut que la fille s’était endormie.
Pas très étonnant au vu des cris qu’il avait entendu au préalable. C’est que ça fatigue, ce genre de sport !
Endormie… ou trop shootée… ou les deux.
Puis il la reconnut : Julia : Assez grande, la taille fine, les seins petits mais fermes, les jambes longues. Depuis le temps qu’il voulait se la faire celle-là !

JB ne perdit pas de temps en tergiversations. Il avait l’intention de profiter de la chance qui lui tendait enfin les bras et le fait que la fille soit inconsciente l’arrangeait plutôt : Au moins une qui ne refuserait pas !
Il se dessapa rapido.

A la lumière orangée qui baignait la chambre, il remarqua les longs cheveux trempés de sa partenaire.
Ca avait dû visiblement être très chaud par ici dans les heures précédentes ! La salope avait dû donner de sa personne !
Il faudrait que quelqu’un pense à la détacher et à la couvrir sinon, elle allait finir par attraper froid si elle restait encore longtemps à baigner dans sa sueur, comme ça.
D’ailleurs elle avait la peau déjà rudement fraiche !
Il se promit de lui trouver une couverture une fois qu’il aurait fini sa « petite affaire ». Mais en attendant, il comptait bien la réchauffer lui-même, et sans tarder !

Il la pénétra sans problème.
Le contraire eut été étonnant vu le nombre de gars qui étaient passés avant lui.
Elle ne réagit même pas lorsqu’il entama rapidement une série de va et vient frénétiques.
Il en fut un peu déçu. C’était quand même mieux quand la gonzesse participait un minimum.

Pour compenser, il ralentit le rythme et s’allongea sur elle, à la recherche de sa bouche…
Bon sang, elle avait les lèvres glacées !

Lorsque, soudainement, JB comprit ce qu’il était en train de faire, il débanda instantanément.

« – Tiens, Alex, t’as rien d’urgent sur le gaz pour l’instant ? »
« – Urgent comme plus urgent que l’urgence prioritaire que tu m’a refilée ce matin ? J’crois pas chef ! »
« – Bon, tu sors avec moi, on vient de m’appeler pour un meurtre. »
« – Ben, dans ce cas, c’est pour la crim’, pas pour nous ! »
« – Si, c’est aussi pour nous : C’est à l’Exotix. »
« – Merde ! Les partouzeurs ont encore frappé ? »
« – Oui, et un peu trop fort, manifestement. »

**

Une fois n’est pas coutume, la discrète entrée du club privé était, en ce froid matin d’hiver, l’objet d’une inhabituelle activité.
De nombreux véhicules de police stationnaient devant et le ballet incessant de fonctionnaires permettraient à quelques riverains aigris de se conforter dans leurs certitudes : Laisser de tels lieux de débauche avoir pignon sur rue était décidément intolérable !

Pierre Sabani pénétra dans les locaux sombres avec une grimace de dégout :
« – Je me demande si ce n’était quand-même pas mieux avant la loi Evin : Au moins, à l’époque, ça sentait le tabac froid ; maintenant, ça pue la sueur rance ! »

Après avoir traversé la piste déserte sur laquelle trainaient encore de nombreux vestiges de la soirée passée, ils suivirent le chemin indiqué : Derrière le bar, une issue habilement dissimulée par un trompe-l’œil ouvrait sur un long corridor à l’éclairage famélique. De part et d’autre, se succédaient des alcôves aveugles dans lesquelles on pouvait deviner des lits, des fauteuils ou des canapés.
« – Mouais, par ici, ça ne pue pas que la sueur, à mon avis ! » renchérit Alexandra.

Ils montèrent un escalier étroit qui débouchait sur un corridor en tout point similaire à celui de l’étage inférieur, à la différence près que les alcôves laissaient deviner des appareillages quelque peu… barbares.
« – Ca pue surtout les emmerdes, oui ! » Termina Pierre alors qu’ils approchaient du fond du couloir, vers une des dernières chambres qui, elle, était vivement éclairée.
De toute évidence, c’était là que ça se passait.

***

Violemment éclairée par la lumière implacable des projecteurs de la police scientifique, la victime gisait encore telle qu’elle avait été trouvée : Totalement nue, le visage tourné sur le côté, les yeux fermés, les bras en croix, les poignets attachés par des menottes aux barreaux du lit, les jambes impudiquement écartées.

Malgré les stigmates de la mort, il sautait aux yeux que cette fille était d’une grande beauté : Abondante chevelure platine, visage fin, lèvres pulpeuses, ongles manucurés, poitrine moyenne, sans doute naturelle, ventre plat, longues jambes effilées, pas un poil de cellulite et pas un poil tout court : Pubis totalement glabre.
Sa seule parure était un discret collier noir parsemé de paillettes en strass, ajusté autour de son cou. L’aspect collier de chien était renforcé par un anneau chromé sur le côté.
Pierre estima qu’elle ne devait pas avoir plus de trente ans.

Sans s’encombrer de mondanités et sans même le regarder, Philippe Davoust, de la crim’, prit Pierre à témoin :
« – Julie Cénac, 28 ans… J’suis d’habitude pas adepte de la viande froide mais là, franchement, avec un tel canon, y a de quoi devenir nécrophile… Quel gâchis ! »
« – Toujours aussi poétique, Philippe, à ce que je vois ! » Railla Alexandra.
« – Tiens, t’es là aussi ma belle, comment tu vas ? »
« – Mieux que cette pauvre fille, visiblement. On a déjà des premières conclusions ? » Répondit-elle en désignant du menton le Chef légiste qui continuait ses activités méthodiques sans se préoccuper des deux nouveaux venus.
« – Bah, j’viens d’arriver moi aussi mais je suis sûr que notre ami Lambert ne va pas tarder à nous livrer, ses premières conclusions, n’est-ce pas Chef ! »
« – Vous savez bien que tant que l’autopsie n’aura pas été pratiquée, rien ne sera certain, Davoust. » Répondit celui-ci sans daigner relever la tête vers son interlocuteur.
« – Ouais, enfin là, compte tenu de la réputation des lieux, entre les menottes et les marques de strangulation sur le cou de la victime, j’suis prêt à prendre les paris : 10 contre 1 sur le jeu sexuel qui a mal tourné ! »
« – Et c’est bien pour cela que vous auriez fait un bien piètre médecin légiste, Davoust, vous vous complaisez dans les conclusions hâtives. »
Pierre ne releva pas la pique. Il connaissait, pour l’avoir pratiqué à quelques reprises, le jeu pseudo conflictuel auquel s’adonnaient les deux fonctionnaires qui, en fait, s’estimaient mutuellement.
« – Ou un accident de shoot ? »
« – C’est l’hypothèse qui vient en second sur ma liste. »
« – Qui l’a découverte ? »
« – C’est justement un peu flou. C’est le patron de la boite qui nous a appelés mais il est resté très évasif sur les circonstances de la découverte… On l’a mis au chaud… Il nous attend avec Saillard, mon adjoint. » Répondit Davoust.
« – On sait quelque chose sur elle ? Elle est mariée, pacsée ?
« – On est en train de chercher… Pour l’instant on a juste ses papiers et donc son adresse… Alors Lambert, ce verdict ? »
Le petit homme à la calvitie prononcée émis un grognement agacé :
« – Puisque je vous répète que je ne donne jamais de conclusions avant l’autopsie ! Y en a qui adorent les paris, ce n’est pas mon cas… Par contre, puisque vous tenez tant à avoir du croustillant, je vous suggère d’éteindre les projecteurs. »
« – On ne va plus rien y voir ! »
« – Au contraire, je suis certain, et pour le coup prêt à parier, que ce que je vais vous montrer va vous captiver… »

Davoust se résolu à obtempérer.

Momentanément aveuglés par le contraste de luminosité, les trois policiers entendirent le légiste donner un ordre à son assistant.
Tandis que celui-ci semblait se battre avec une commande quelconque, l’homme déclama d’une voix moqueuse :
« Regardez à quoi ressemble votre joli macchabée sous la lumière noire, Capitaine Davoust …
Un putain de sapin de Noël ! »
Les trois policiers restèrent bouche bée lorsque les projecteurs spécifiques se mirent en marche… Ils comprirent instantanément l’allusion du légiste :
Sous la lumière bleutée chargée de mettre en évidence les fluides corporels, le cadavre brillait de mille feux.
Les tâches fluorescentes maculaient la quasi intégralité du corps. Avec des concentrations plus prononcées au niveau du visage, de la poitrine et, évidemment, de la région pubienne. De nombreuses giclées opalescentes zébraient le ventre et les cuisses de la jeune femme.
Le matelas n’avait pas été épargné mais l’espace visible à la jointure des jambes de la victime était uniformément brillant.
Bizarrement et de façon totalement incongrue, ce spectacle évoqua à Pierre une photographie aérienne d’une métropole prise de nuit… avec son centre ville lumineux, ses artères et sa banlieue de moins en moins éclairée.

Premier à se remettre de la surprenante vision, Philippe Davoust siffla entre ses dents :
« -Pffiou !! Mazette ! C’est ce qui s’appelle avoir pris cher ! Comme j’imagine que ceci ne peux être l’œuvre d’un seul homme, ni même de deux, fussent-ils très « productifs », j’espère que vos services sont prêts à faire des heures sup’, Lambert !

De petite taille, le front dégarni et l’œil fatigué par une nuit difficile malgré l’habitude des nuits blanches, Jérôme Plantin, dit Jipé, ne payait pas de mine.
De toute évidence, le patron de l’Exotix n’appréciait guère de voir son établissement envahi par la police mais il redoutait avant tout que cette intervention ne se solde par une fermeture temporaire.
C’était pourquoi il semblait vouloir faire preuve de coopération.

« – Alors, Monsieur Plantin, pouvez-vous nous relater le plus précisément possible les circonstances de la macabre découverte, s’il vous plait ? »
Après une courte hésitation, il se décida :
« – C’était juste avant la fermeture… un client et venu voir mon barman, il avait croisé un type affolé sortant d’une des chambres de l’étage et comme ça l’avait intrigué, il a eu la curiosité d’aller y voir de plus près et il a découvert… la femme inanimée. »
« – Morte. »
« – Ouais, enfin c’est ce qu’il a vite compris. Alors il a alerté le barman qui m’a prévenu. »
« – Et ce client, vous le connaissez ? »
« – Lequel ? Celui qui s’est enfui ou celui qui nous a alerté ? »
« – Les deux mon capitaine ! »
« – Si vous croyez que je demande une pièce d’identité à chaque client ! »
« – Vous devriez peut-être… »
« – Ca serait ma ruine. Vous savez, dans ce milieu, tout le monde est très à cheval sur son anonymat, surtout les hommes seuls. »
« – Je me demande bien pourquoi ! » ironisa Philippe Davoust « Et alors, ces noms, vous les avez ? »
« – Celui du client qui nous a prévenu, oui, il l’a donné de lui-même en cas de besoin mais il a demandé à ce qu’on reste très discret si on veut le contacter. »
« – Ne vous inquiétez pas, la discrétion, on connait. Et l’autre, l’affolé ? »
« – Non, au moment où on m’a prévenu, il était déjà parti sans demander son reste. »
« – Tu m’étonnes ! Et est-ce que vous avez eu un signalement de la part de votre client providentiel ? »
« – Oui, d’après ce qu’il nous à dit, il semble que le gars en question soit un de nos habitués : Il se fait appeler JB mais c’est tout ce qu’on sait de lui. Il ne s’étend pas sur sa vie privée, d’ailleurs, c’est plutôt un solitaire et il paye toujours en liquide, comme une grande majorité de la clientèle. »
« – Ce qui est bien pratique pour sous-estimer les recettes, n’est-ce pas ? Mais là n’est pas question. Parlez-nous de la victime, maintenant : Vous la connaissiez, elle aussi c’était une habituée ? »
« – Elle avait déjà dû venir deux ou trois fois… on ne peut pas vraiment appeler ça une habituée. En général, on commence à repérer les gens au bout de cinq ou six fois… Mais elle, avec un physique aussi exceptionnel, difficile de ne pas la remarquer. »
« – En effet. Et elle venait seule ou accompagnée ? »
« – Elle est toujours venue accompagnée, toujours par le même homme. »
« – Et il était où cet homme, au moment de la découverte ? »
Plantin eut un moment d’hésitation.
« – Il était parti. Je ne sais pas depuis combien de temps. »
« – Ben voyons ! Je sens qu’on ne va pas manquer de suspects, dans c’t’affaire ! Et il ressemble à quoi, celui-là ? »
« – La cinquantaine, plutôt BCBG. »
« – Un gars de la haute ? Lui aussi vous deviez le remarquer, alors. »
« – Détrompez-vous, notre clientèle est des plus hétéroclite. Nous sommes un des rares milieux où se côtoient aussi bien les chômeurs et les ouvriers que les chefs d’entreprises, les médecins et autres avocats. Il n’y a rien de plus égalitaire que le sexe : Nu, sans vos signes extérieurs de richesse, vous êtes l’égal de votre voisin ! »
« – Ouais, épargnez-nous votre baratin égalitariste… Donc, Entre l’arrivée du couple et le départ du compagnon puis la découverte du corps, vous n’avez rien remarqué d’anormal lors de cette soirée ? Si tant est que l’on puisse appeler vos soirées « normales » ! »
« – Non, rien de bizarre… je fais régulièrement des tours de contrôle dans les couloirs afin de vérifier que tout va bien, que personne ne manque de rien, que personne ne se fait importuner… »
« – Ca arrive ? »
« – Quoi ? »
« – Ben que des femmes se fassent « importuner », comme vous dites. »
« – Bien-sûr, quelques fois. Il y a des cons et des lourdauds partout. Mais vous seriez étonnés de constater qu’il y en a probablement moins ici que dans une boite de nuit traditionnelle : Les gens ici, sont beaucoup plus respectueux et, en général, lorsqu’une femme dit non une fois, elle n’a pas besoin de le répéter… Sauf crevards et autres morts de faim. »
« – Même à l’étage ? »
« – Oui… Pourquoi cette question ? »
« – Et bien, d’après ce que j’ai vu, vous avez une impressionnante collection d’outils de contention… et je me demande si une femme peut encore dire non et être entendue une fois qu’elle est attachée pieds et poings liés à l’un de vos instruments de torture. »
« – Bien évidemment ! D’abord et surtout parce qu’elle est rarement seule : C’est le plus souvent son compagnon qui l’y attache (à sa demande) et qui filtre les « attentions » des éventuels autres hommes. »
« – Oui, sauf que le compagnon de notre victime n’était plus là, cette nuit… »
« – C’est certain. »
« -… et qu’à première vue, votre cliente a reçu les « attentions », comme vous dites, d’un nombre de partenaires assez incroyable.
« – Bah ! C’est le principe d’une soirée « pluralité masculine ». ! »
« – Pluralité masculine ? Qu’est ce que vous entendez par là ? »
« – Ben ça parle tout seul, non ? Vous avez des soirées couples où ne sont admis que les gens en couple, vous aves les soirées mixtes dans lesquelles peut entrer un certain quota d’hommes seuls et parmi ces soirées mixtes, nous organisons quelques soirées spéciales dites de pluralité masculine où le quota d’hommes seuls et beaucoup plus élevé… pour le plaisir de ces dames. »
« – Des plans gang-bang, en somme ! »
« – Oui, mais pas que. La pluralité, ça commence à deux. »
« – Et donc, notre victime était déjà venue à une soirée de ce genre ? »
« – Oui, d’autant que je me souvienne, elle n’est venue qu’à des soirées « pluralité ».
« – OK. Juste une dernière petite question, pour l’instant : A tout hasard, vous n’auriez pas quelques petites caméras indiscrètes qui filmeraient certaines de vos chambres, par exemple ? »
« – Vous plaisantez ! » S’exclama l’homme avec un ton exagérément outragé.
« – Dommage ! Ca aurait rendu l’enquête plus facile. »
« – Ce mec nous cache quelque chose. »
« – Plantin ? Qu’est-ce qui te fais dire ça ? Je l’ai trouvé plutôt coopératif, moi. »
« – Ben justement : Un peu trop coopératif à mon goût. C’est pas net ! »
« – Oh ben si maintenant faut se méfier de tous les témoins, même des plus bavards, on n’a pas fini ! »
« – En tout cas, Davoust aura appris des choses, aujourd’hui ! » Ricana Pierre
« – Oui, il aura de quoi raconter à maman, ce soir. Ca lui donnera peut-être des idées ! » Surenchérit Alexandra en rigolant.
« – Et ce n’est sans doute pas fini ! »

Le témoin principal se nommait Xavier Lebris. Du moins, c’était le nom qu’il avait laissé. Mais il ne serait pas compliqué de le vérifier.
Agé d’une quarantaine d’années, il présentait plutôt bien : Grand, cheveux bruns coupés court, le regard franc. On pouvait même affirmer sans se tromper qu’il était très bel homme.
Sans vouloir s’avouer qu’elle était sous le charme, Alexandra lui accorda d’instinct sa confiance, même s’il avait insisté pour les rencontrer dans un café anonyme.
Il s’en expliqua d’ailleurs immédiatement :
« – Je suis marié et mon entourage ne sait pas que je fréquente des établissements comme l’Exotix. »
« – Ne vous inquiétez pas, Monsieur Lebris, nous ne sommes pas là pour vous juger. »
« – Je n’avais de toute façon pas l’intention de me justifier plus que cela. Les aléas de la vie vous font parfois faire des choses que vous n’auriez jamais imaginées. »
« – C’est d’ailleurs tout à votre honneur d’avoir devancé les démarches et d’avoir laissé vos coordonnées au patron du club. »
« – Un honneur très relatif, je le crains : Vous auriez fini par me retrouver de toutes façons… »
« – Comment-ça ? »
« – Et bien, je suppose que vous allez faire analyser toutes les traces ADN retrouvées sur le corps… »
« – Vous voulez dire que… »
« – Oui, il y a de très grandes chances que vous y retrouviez les miennes… Et comme j’ai fait quelques conneries par le passé, il est aussi probable que vous m’auriez retrouvé dans vos fichiers. »
« – Voilà qui est fort intéressant ! » S’exclama Pierre « Voulez-vous bien nous raconter tout depuis le début. Ca sera plus clair pour nous. »
« – Oh, je ne vais pas vous être d’une si grande utilité : J’admets juste que j’étais parmi ceux qui se sont « soulagés » dans ou sur Julia – Sur, pour ma part – Mais je peux vous assurer qu’à ce moment là, elle était tout ce qu’il y a de plus vivante ! Les autres pourront en témoigner ! »
« – Les autres ? Vous étiez combien à vous « soulager », comme vous dites ? »
« – A ce moment là, quatre ou cinq. Mais quand je suis repassé plus tard dans la soirée, ils étaient plus nombreux. »
« – Et elle était toujours vivante ? »
« – Oh que oui ! Vu les cris qu’elle poussait, il n’y avait pas de doute ! »
« – Et qu’est-ce qui vous fait croire que ce n’était pas des appels au secours ? »
« – Eh ! Je sais encore faire la différence entre un appel à l’aide et des cris de jouissance ! »
« – Donc elle prenait son pied ? »
« – Oui, et pas qu’une fois ! »
« – Son compagnon était là, lui-aussi ? »
« – Son maître ? Paul ? Oui, il était là. »
« – Son maître ? »
« – Ben oui ! Ne me dites pas que vous n’avez pas remarqué son collier de soumise ! »
« – Si si ! » Répondit précipitamment Pierre en se remémorant l’espèce de collier de chien autour du cou de la victime. Il commençait à se dire que si des jeux de domination/soumission commençaient à se mêler à l’histoire, il y avait fort à parier que l’hypothèse du jeu sexuel ayant mal tourné de Davoust allait prendre de la consistance.
« – Et donc, ce « maître » il se dénomme Paul, c’est ça ? » Nota Alexandra.
« – Oui. Du moins, c’est comme ça que tout le monde l’appelle. »
« – Et vous savez qu’elle relation ils entretenaient, tous les deux, en dehors de maître et soumise ? »
« – Non. Aucune idée. »
« – Il ressemble à quoi, ce Paul ? »
« – Assez grand, brun grisonnant, sûr de lui, petite cinquantaine… classieux. »
« – Et donc ensuite. Quand êtes-vous retourné vers la chambre ? »
« – J’ai longuement discuté avec un couple au bar et nous avons fini par nous isoler, à trois… Je n’y suis donc retourné qu’une fois : A la fin, lors d’un dernier petit tour… pour voir… »
« – Et vous avez vu. »
« – Oui. J’ai failli être renversé par un type qui sortait brusquement de la pièce, l’air complètement affolé… Alors je suis allé voir ce qui l’avait paniqué à ce point… Quand j’ai vu Julia inanimée, j’ai senti qu’il y avait un truc qui clochait… Quand je l’ai touchée, j’ai vite compris. »
« – Et ce type. Vous le connaissiez ? »
« – Je l’avais déjà croisé à plusieurs reprises. C’est un petit monde, vous savez, on repère vite les visages des habitués. Mais je ne connaissais pas son nom. »
« – Vous croyez que c’est lui qui à fait le coup ? »
« – Vu sa tête, ça aurait été possible mais c’était aussi la tête d’un mec qui avait une peur bleue de se faire surprendre seul avec une morte. D’ailleurs, elle était déjà bien froide quand je l’ai touchée… Non, à mon avis, ce n’était pas lui. »
« – Et comment expliquez-vous l’absence de son maître (Paul ?) à ce moment là de la soirée ? »
« – C’est tout à fait dans leurs habitudes : Au bout d’un moment, il s’en va et la laisse prendre un taxi pour rentrer… Pas très classe, hein ? Mais c’est comme ça qu’ils fonctionnent. »
« – Attendez ! Attendez ! » Intervint Alexandra « Vous êtes en train de nous parler d’eux et de leurs « habitudes » comme si vous les connaissiez bien. Or le patron de la boite nous a indiqué que ce n’était que la deuxième ou troisième fois qu’ils y venaient. Je ne saisis pas bien. »
« – Il vous a dit ça ? » D’abord surpris, Xavier Lebris esquissa ensuite un sourire entendu. « Remarquez, je le comprends. »
« – Ben pas nous. Alors il faudrait nous affranchir. » Répondit Pierre sèchement.
« – Ce qu’il faut savoir, c’est qu’un club libertin, comme n’importe quelle boite de nuit, est rentabilisé par deux choses : Les entrées et les consommations. Mais la distinction avec une boite normale, c’est que le prix des entrées n’est pas le même pour tout le monde : Un homme seul paye souvent plus du double d’un client venant en couple et, souvent, ce sont ces hommes seuls qui consomment le plus puisqu’ils n’ont souvent que ce moyen pour nouer le contact avec un couple ou une femme. »
« – Moralité : Il faut attirer l’homme seul pour rentabiliser le truc. »
« – Oui mais pas trop non plus car s’il y a trop d’hommes seuls, ça peut faire fuir les couples qui ne veulent pas être trop « sollicités », sauf dans le cas de soirées où la pluralité masculine est justement le but du jeu. »
« – D’où l’intérêt de multiplier les soirées « pluralité masculine » ! »
« – Oui, mais dans ce cas, pour faire venir le chaland il faut s’assurer de la présence d’un nombre minimal de jeunes femmes avenantes et très demandeuses, or, ça ne courre pas les rues. »
« – Mais plutôt les trottoirs… » Réalisa tout haut Alexandra.
« – Exactement, vous avez tout compris : Certains clubs privés n’hésitent pas à avoir recours à de vraies prostituées pour jouer les fausses libertines en chaleur… C’est tout bénef pour tout le monde : La prostituée travaille au chaud dans un milieu sécurisé, les mecs trouvent de la nana apparemment gourmande et pas trop regardante tandis que le patron remplit son tiroir-caisse à moindre frais. »
« – Imparable ! Et vous croyez qu’elle en était une ? »
« – Julia ? Non, je ne pense pas. C’était une véritable hypersexuelle et du pain béni pour le patron de l’Exotix : Une nana super canon qu’il n’avait même pas à rémunérer ! Mais par contre, je suis certain qu’elle et Paul ne payaient pas leur entrée depuis longtemps et peut-être avaient-ils d’autres avantages que je ne connais pas… Alors mettez-vous à la place du patron : Il n’allait pas vous dire que sa petite bombe fétiche venait quasiment tous les week-ends. Vous auriez trouvé ça louche et vous auriez sans doute posé des questions auxquelles il n’avait peut-être pas envie de répondre… C’était bien plus simple de vous dire qu’elle venait presque pour la première fois. »
« – Et sinon, au regard de votre expérience visiblement aguerrie dans le milieu, vous avez pu déceler la présence de prostituées dans cet établissement ? »
Xavier Lebris afficha un sourire énigmatique : « Euh… Joker. »
« – Hé ! Faites pas le mariole ! Y a pas de joker qui tienne avec nous. Répondez à la question s’il vous plait ! » Rectifia sèchement Pierre.
« – Ok ! Ok ! De toute façon, je n’ai aucune certitude… juste de vagues soupçons : Quand vous voyez une nana canon venir plusieurs fois de suite avec à chaque fois un « chevalier servant » différent, il y a de quoi se poser des questions… Surtout quand la nana en question ne dit non à quasiment personne.
« – Et pensez-vous qu’une de ces « professionnelles » aurait pu en vouloir à Julia pour sa « concurrence déloyale » ? » Demanda Pierre pour qui cette hypothèse prenait soudain une consistance plus qu’intéressante.
« – Au point de vouloir l’éliminer ? Là, franchement, vous m’en demandez trop. »

***

Au retour de cet entretient, Pierre ruminait.
« – Lui aussi, je le trouve bien bavard… Un peu trop même peut-être. »
« – En tout cas, il nous aura donné des infos précieuses qui contredisent les dires du patron de la boite. »
« – Oui, mais un truc me chagrine quand-même : Si ce type savait qu’on allait le retrouver uniquement grâce à son ADN c’est parce qu’il est dans nos fichiers. Or, dans ces fichiers, ne sont recensés que les criminels sexuels… »
« – Ce qui voudrait dire que les « quelques conneries » de son passé, comme il les a appelées, ne sont pas si bénignes. »
« – Exactement. Tu te charges de retrouver ça ? »
« – Ok patron, ça marche ! »

Les enquêteurs avaient de la matière :
– Un patron de boite sans doute moins net qu’il n’y paraissait,
– Un témoin principal apparemment coopératif mais au passé trouble,
– Un premier suspect au comportement plus que douteux,
– Une victime loin d’être une oie blanche,
– Un compagnon énigmatique,
– Des concurrentes potentiellement vindicatives,
– Et pour couronner le tout : Un nombre encore incalculable de coupables potentiels !

Vaste programme !
Manquait plus que la dimension politique et on avait la totale !

Une enquête qui puait l’enlisement nauséabond.
Une enquête comme les exécrait Pierre Sabani.

Alexandra avait le regard futé de celle qui tient une info croustillante et qui guète avec gourmandise la réaction de son interlocuteur lorsque celui-ci en aura eu pris connaissance.
« – Tu voulais une dimension politique ? Ben tu l’as : Julie Cénac travaillait à l’assemblée nationale, en tant que secrétaire. Son patron ? Un certain Paul Ducheussy, attaché parlementaire, bras droit du Député Montigny… Tiens, voici la photo de Ducheussy que je viens de trouver sur sa page Facebook. Je trouve qu’il colle bien à la description : « La cinquantaine, BCBG, grand, brun, classieux… Tu ne trouve pas ? » Elle rajouta, hilare : « Je suis sûre que t’es heureux, là. »
« – Je nage dans le bonheur ! Tu peux pas t’imaginer ! Quand je te disais que ça allait être une enquête pourrie… Sinon, Davoust a pu aller fouiller le domicile de la victime ? »
« – Oui, Selon lui, un appartement classique d’une jeune célibataire, dans le quinzième. Il n’y a pas grand-chose à en dire si ce n’est, paraît-il, une impressionnante collection de sous-vêtements de marque. Il en semblait tout émoustillé, le petit capitaine ! »
« – De quoi lui donner des idées… Mme davoust risque d’être gâtée, prochainement. »
« – Pour un peu, je l’envierais ! »
« – A part ça, il a reçu le rapport d’autopsie ? »
« – Oui. Selon le légiste, la mort n’est pas consécutive d’une strangulation. Les marques sur sa gorge sont bien due à une pratique sexuelle « extrême » mais elles n’étaient que superficielles. Ce n’est pas ce qui l’a tuée. Du coup, on s’oriente plutôt vers une cause chimique et on attend le retour des analyses. »
« – Ok. Bon, ce n’est pas que ça m’enchante, mais il va nous falloir aller rendre visite à ce Monsieur Ducheussy… Je sens que ça va me plaire. » Conclut Pierre, cyniquement.

Paul Ducheussy était un homme fort occupé. Il reçu les deux policiers entre deux rendez-vous, visiblement peu satisfait de voir son emploi du temps chamboulé par cette incursion forcée de la maréchaussée.
S’il toisa Pierre Sabani d’un air suffisant,le regard appréciateur qu’il jeta sur Alexandra s’avéra bien plus… intéressé.

« – Que puis-je pour vous ? »
« – Merci de nous recevoir. Nous désirons vous entretenir de votre collaboratrice, Mademoiselle Cénac. »
« – Et bien, dans ce cas, il aurait été tout aussi simple de voir ça directement avec elle, enfin… dés qu’elle sera là. De toute évidence, elle s’est faite porter pâle, ce matin. Pourquoi, il y a un problème ? »
« – On peut dire ça comme ça : Elle est morte. »
Pierre affectionnait ce genre d’annonce sans sommation. En dépit de leur extrême brutalité, l’examen attentif de la toute première réaction de son interlocuteur lui donnait des indications précieuses sur l’implication ou non de celui-ci dans l’affaire.
En l’espèce, soit Ducheussy s’avérait un très bon comédien, soit il était réellement atterré par l’annonce de la disparition de sa collaboratrice.
« – M-morte ! Mais comment ça ? »
« – Ah, le comment reste encore à déterminer, mais ce qui est le plus intéressant, pour l’instant, c’est le où… puisqu’elle a été découverte totalement dénudée, attachée à un lit dans un club libertin nommé l’Exotix. »
L’homme pâlit davantage, si c’était encore possible.
« – Monsieur Ducheussy, nous aimerions connaître la nature de vos relations avec mademoiselle Cénac. »
« – Qu’entendez-vous par là ? » Demanda-t-il d’un ton soupçonneux. « Mademoiselle Cénac est… était ma secrétaire, nous entretenions des relations professionnelles, bien entendu. »
Le bougre s’était remis de sa surprise à une vitesse vertigineuse. La pratique de la politique lui conférait manifestement une capacité hors norme à retomber sur ses pieds en toutes circonstances. »
Alexandra pris le relai sans fléchir :
« – Monsieur Ducheussy, nous savons que Julie Cénac entretenait une relation de domination/soumission avec un dénommé Paul qui, selon les témoignages, porte plutôt bien la cinquantaine et est issu d’un milieu aisé… Si vous insistez, il nous sera facile de montrer votre photo aux habitués de l’Exotix pour confirmation mais nous espérions que vous nous feriez gagner du temps. »
L’attaché parlementaire n’insista pas. Après une brève réflexion, il admit :
« – OK, OK. Pas besoin de sortir tout de suite la grosse artillerie avec vos menaces. De toute façon, je ne me suis jamais caché en dehors d’ici. J’avais bien une liaison avec mademoiselle Cénac. Mais par contre, je vous jure que je n’ai rien à voir avec sa mort ! La dernière fois que je ‘ai vue, elle était bien vivante ! »
« – Justement, c’était quand cette dernière fois ? Dans la nuit de dimanche à lundi ? A l’Exotix ? »
« – Oui, en effet. »
« – D’où vous êtes parti seul en la laissant « s’amuser » avec un nombre impressionnant de « petits camarades ». »
« – Apparemment, vous êtes bien renseignés. »
« – Et hier, vous n’avez pas cherché à prendre de ses nouvelles ? »
« – Si mais elle ne répondait pas au téléphone. Ce qui ne m’a pas plus étonné que ça. Elle avait pris sa journée. Je supposais qu’elle se remettait de sa nuit. »
« – Sauf qu’aujourd’hui, elle ne s’est pas présentée. »
« – Non, comme je vous l’ai dit. Mais je ne flique pas mes employés… encore moins ma maîtresse. »
« – Pourtant, en tant que soumise, elle devait vous rendre des comptes, non ? »
« – Non. Nous ne mélangions pas jeux sexuels et travail. Pendant la semaine, elle était ma secrétaire, pas ma soumise ; »
« – Ce que j’ai de mal à concevoir, c’est que vous l’ayez laissée toute seule, aux prises à une horde de mecs en rut, dans ce club… C’est vachement dangereux, non ? »
« – Pas tant que ça, les mecs sont respectueux. »
« – Ne vous fatiguez pas : Plantin nous a déjà fait le couplet sur le respect. »
« – Et il a raison. »
« – Ca n’explique toujours pas votre attitude qui semble a priori une exception, dans ce joli petit monde : En général, les hommes en couple restent pour « protéger » leur compagne. Pourquoi pas vous ? »
« – Pfff…. C’est une longue histoire. »
« – Nous avons tout notre temps. »

L’homme sembla réfléchir puis se lança :
« – Lorsque j’ai embauché Julie, nous n’étions pas amants… Et je ne l’ai pas embauchée pour que nous le devenions. Elle avait de réelles compétences professionnelles et c’était avant tout ces compétences qui m’avaient attiré. »
« – Mouais… C’est certain qu’être roulée comme une bombe atomique, ça n’a jamais aidé personne ! »
« – Je n’ai pas dit ça non plus. C’est vrai que c’est toujours plus agréable de travailler avec une jeune femme au physique avantageux… D’ailleurs, au bout d’un moment, je n’ai pas pu m’empêcher de la draguer. »
« – Ben voyons. Et ce « moment », ça faisait combien, exactement ? »
« – Un mois ou deux. »
« – Ah oui, je vois. Une révélation comme qui dirait ! Et bien sûr, une jeune secrétaire fraichement engagée, ça ne refuse rien à son attaché parlementaire de patron… »
« – Hé ! Si vous êtes en train de sous entendre du harcèlement sexuel ou toute autre joyeuseté de ce genre, j’arrête tout de suite et vos questions vous irez les poser à mon avocat ! Je ne l’ai pas forcée à quoi que ce soit ! C’est dingue : Maintenant, on ne peut plus draguer une nana sans passer pour un détraqué, merde ! »
« – On se calme. On se calme… On ne vous accuse de rien du tout pour l’instant, on veut juste comprendre… Donc vous l’avez draguée et elle a succombé, c’est ça ?
« – C’est exactement ça. Elle était libre, moi aussi, ça a collé. Ca vous parait si peu probable ? »
« – Je n’ai jamais dit ça. Et comment qualifieriez-vous votre relation, au départ ? Classique ou déjà portée sur les choses plus… exotiques, sans faire de mauvais jeu de mot ? »
« – Au départ, tout ce qu’il ya de plus classique : Malgré sa grande beauté, elle n’avait que peu d’expérience et des expériences pas toujours très heureuses… Vous vous doutez bien qu’avec un tel physique elle avait attiré plus d’un homme et pas que des gentlemen… Mais assez vite, je me suis rendu compte qu’elle avait un sacré tempérament, que sous ses airs de sainte nitouche se cachait une vraie tigresse… Alors, je l’ai un peu poussée dans ses retranchements, je l’ai initiée à des jeux un peu plus… épicés. »
« – Comme ? »
« – Allons, ce n’est pas à vous que je vais faire un dessin. Vous voyez très bien ce que je veux dire. Et c’est comme ça que nous en somme venus à la domination-soumission. »
« – Et elle était une élève douée ? »
« – Très ! A tel point que je me suis vite senti dépassé : Elle en voulait toujours plus. Toujours plus de sensations, toujours plus je jeux, des jeux de plus en plus extrêmes… Si bien que j’ai commencé à convier quelques amis à nos jeux… Et ça lui a plu… Alors je l’ai emmenée en club… Elle a adoré… Etre le centre d’attention de tout un groupe d’hommes excités comme des taureaux, c’était ça qui lui plaisait. Là, elle prenait vraiment son pied. Et son rôle de soumise n’était plus qu’une façade car c’était elle qui menait le jeu, c’était elle qui décidait qui, comment et où… Et là encore, une fois qu’elle a eu goûté à la pluralité masculine, elle ne se contenta pas d’une fois… Ni de deux ou trois mecs… Il lui fallut toujours plus de partenaires pour assouvir sa libido… Du coup, quand elle était partie dans ses délires, il arrivait fréquemment qu’elle ne fasse plus du tout attention à moi… Au bout d’un moment, j’en avais ma claque de l’attendre et je m’en allais en payant d’avance son taxi… Elle ne m’en voulait pas, au contraire : Elle m’était toujours reconnaissante de lui faire connaître autant de plaisir et elle aimait se lâcher sans moi. »
« – Et vous n’aviez pas peur pour elle ? Vous ne craigniez pas qu’un détraqué se cache parmi les hommes seuls du club ? »
« – J’aurais peut-être dû, en effet, mais non, je connaissais le club, je connaissais le patron, je pensais qu’il n’y avait aucun risque… j’avais tort. »
« – De toute évidence. Et à votre connaissance, est-ce qu’elle se droguait ? »
« – Julie ? Jamais de la vie ! Sa dope c’était le sexe… Beaucoup de sexe et un peu de champagne : Voilà son cocktail pour décoller. »
« – Elle a rien pris devant vous ce soir-là ? »
« – Non, rien. Pourquoi ? On a trouvé quelque chose ? »
« – On ne sait pas encore. Les recherches sont en cours… Mais c’est une hypothèse. »
« – Si elle a pris quelque chose, c’était sans doute à son insu car elle détestait tout ça. »
« – Pourtant, pour une fille qui aimait repousser les limites et connaître des expériences nouvelles… »
« – Oui mais non, pas ça. »
« – Et vous lui connaissez des ennemis ? »
« – Non. Aucun. »
« – Avait-elle accès à des dossiers sensibles, en tant que secrétaire ? »
« – Rien de top secret… En tous cas rien qui justifie un meurtre. »
« – On n’a pas encore parlé de meurtre. »

***
« – Qu’est-ce que t’en pense ? »
« – Mouais. A l’écouter, on croirait que c’était elle la domina et lui le soumis… Et son explication ne m’a qu’à moitié convaincu : Je trouve toujours louche qu’il parte du club sans s’occuper d’elle alors que c’est lui qui l’y amène. Ca ne tient pas, à mon avis. »
« – Au moins, il ne nous a pas mis de bâtons dans les roues et nous a raconté tout ce qu’on voulait savoir. »
« – Oui, ou plutôt tout ce qu’il voulait bien nous dire. Ca m’inquiète toujours quand les suspects parlent sans que j’aie besoin de leur tirer les vers du nez… Surtout quand ce sont des politiques. »

« – Bon, on fait quoi maintenant ? »
« – Ton agent commercial, il est pas trop jaloux ? »
« – Hein ? Qu’est ce que tu racontes ? Qu’est ce que Yannick a à voir là-dedans ? »
« – Rien, je te demande juste s’il n’est pas trop jaloux. »
« – Pourquoi ? Tu veux me faire une demande en mariage ? Je te signale que c’est un peu tard… Il y a quatre ou cinq ans, je dis pas mais là… »
Pierre afficha un sourire espiègle :
« – Ouh-la ! Loin de moi l’idée de te faire une demande. Je crois que je suis vacciné question engagement… Non, je pensais juste à une proposition loin d’être malhonnête mais qui nécessite juste que ton homme ne soit pas trop susceptible de ce point de vue là et qui nous permettrait peut-être d’y voir plus clair dans cette histoire… »
Alexandra ouvrit soudain de grands yeux :
« – Oh punaise ! Ne me dis pas que tu penses c’que je pense que tu penses, là ! T’es pas sérieux, hein ! »
« – Ben… Ca dépend à quoi tu penses… »
« – Non ! Je te vois venir avec tes gros sabots… Même pas en rêve ! »
« – Ben pourquoi ? C’est pas si terrible que ça. »
« – Non-non ! C’est hors de question. Tu n’as qu’à y aller tout seul. »
« – Allons, tu sais bien que ce sera beaucoup plus crédible à deux… et plus efficace aussi. »
« – Non-non-non ! Qu’est ce que je vais dire à Yannick, moi !? »
« – Ben justement, t’es pas obligé de tout lui raconter… De toute façon, on irait que pour voir, se faire une idée de l’ambiance et pêcher des infos… »
« – C’est ça ! Toi tu pêches et c’est moi qui fais l’appât… Je vois déjà le tableau, c’est hors de question ! »

A l’autre bout du fil, Philippe Davoust ne semblait guère enchanté.
« – Salut Pierre. J’ai une mauvaise et une mauvaise nouvelle. Je commence par laquelle ? »
« – Ben commence par la moins mauvaise. »
« – On a reçu les résultats de la toxicologie et de l’alcoolémie : Rien ou quasi rien : La demoiselle était un brin bourrée (0,8 grammes) mais pas de quoi fouetter un chat et encore moins provoquer le décès. Et côté toxico, que dalle ! La fille était propre… Enfin propre, façon de parler car j’en viens à la deuxième mauvaise nouvelle : Figure-toi que le labo a isolé pas moins de 24 ADN différents sur le corps… ou dedans d’ailleurs, à croire qu’ils ne connaissent pas les capotes, dans ce club, c’est inconcevable !
En tout cas, ça va prendre un temps fou pour les identifier tous, un par un, a condition évidemment qu’on les ait dans une quelconque base de donnée, ce qui est loin d’être évident. On n’est pas sorti de l’auberge, mon gars ! Et c’est rien : On n’a pas encore attaqué le plumard ! Je sens qu’on va battre des records dans cette enquête !
Sinon, t’as eu les résultats de l’autopsie ? »
« – Oui, Alex m’en a touché deux mots : Rien de concluant non plus de ce côté là. »
« – Non, du moins en ce qui concerne les causes de la mort parce que sinon, c’était assez édifiant. Même Lambert, le légiste, était impressionné. C’est pas peu dire ! »
« – Ah ouais ? »
« – Ouais, n’étaient les circonstances particulières de la découverte et le lieu du décès, il aurait sans hésitation conclu à un viol en réunion et tu connais pourtant son goût pour les conclusions hâtives !
Mais là, tout y était : Ecchymoses multiples, déchirures anales et lésions vaginales… et je te passe les détails les plus scabreux. Franchement, cette Julie Cénac avait beau être une sacrée chaudasse, j’ai du mal à concevoir qu’une fille aime se faire défoncer à ce point. »
« – Charmant ! Difficile de réaliser jusqu’où peuvent aller certains dans la recherche du plaisir… Mais rien ne nous dit qu’elle était consentante jusqu’au bout, d’ailleurs… En tout cas, il n’y avait pas de quoi la tuer ? »
« – Non, elle n’a pas été étranglée (au-delà du jeu sexuel), ni étouffée. Aucune des lésions internes ou externes n’étaient létales, même considérées ensemble. On sait juste qu’elle est décédée d’un arrêt cardiaque mais ça c’est la conséquence, pas la cause. »
« – Un mystère, quoi. »
« – Ouais, un putain de mystère… J’attends des analyses complémentaires mais j’ai peu d’espoir. Pour l’instant, on n’a aucune idée de ce qui a pu causer la mort de cette nana. »
« – Tu me tiens au courant, de toute façon. »
« – Bien sûr. Et vous, vous avez réussi à « interviewer » du monde ? Ca a donné quoi ? »
« – Pas grand-chose non-plus… Tous ces messieurs donnent l’impression d’être aussi droits dans leurs bottes qu’ils le sont dans leur slip… Du moins en apparence mais j’ai quand-même quelques doutes quant à leur bonne foi. Du coup je me suis dit qu’une petite visite en immersion ne serait pas superflue : J’ai réussi à convaincre Alex de m’accompagner à l’Exotix vendredi soir puisqu’on a décidé de ne pas fermer la boite pour ne pas éveiller les soupçons… Je n’en attends rien de spécial mais sait-on jamais, on pourrait avoir du bol et tomber sur LE truc qui nous manquait pour comprendre toute l’affaire. »
« – Sans blague ? Purée, c’est trop con, j’ai quelque chose de prévu vendredi, sinon je serais bien venu avec vous, ne serait-ce que pour brancher la jolie Alex ! Hé-hé ! »
« – Oh ! Rêve pas trop. On y va pour le boulot. »
« – Ben voyons ! Jure-moi que tu ne vas pas essayer d’en profiter une peu. En tout cas, moi, à ta place, je n’hésiterais pas. »
« – Non mais pour qui tu me prends ? Elle est maquée, je te rappelle, et je te répète qu’on y va pour essayer de trouver des infos ! »
« – Mouais, à d’autres ! En tout cas, je veux que tu me racontes tout après. Et je veux tous les détails ! »
« – Sans problème. Je crois que tu t’excites un peu pour rien, tu sais. »
« – On verra bien. Et si ça se trouve, vous allez tomber sur le dernier gars, celui qui fuyait. »
« – Le dénommé JB ? Là, ce serait un vrai coup de chance. Mais je n’y crois pas trop non plus. A mon avis, il va se faire discret un petit bout de temps. Par contre, je compte bien approfondir cette histoire de prostitution plus ou moins masquée dont nous a parlé Lebris, le témoin le plus précieux, pour l’instant. »
« – Ah ouais, je vois, même quand tu bosses pour la crim’, tu ne peux pas t’empêcher de penser à ta chapelle ! »
« – Que veux-tu. On est consciencieux ou on ne l’est pas… Et y en a même qui arrivent à faire deux choses à la fois… Essaye une fois, tu verras, c’est une expérience à vivre ! »
« – Enfoiré ! »

« – Pierre ? C’est Philippe. Votre petite escapade libertine est toujours prévue pour ce soir ? »
« – Oui, pourquoi ? »
« – Ben vous pouvez tout arrêter : On sait de quoi est morte Julie Cénac. »
« – Ah ouais ? Raconte ! »
« – On a reçu les résultats des analyses complémentaires ce matin et notamment les dernières analyses de sang : On a relevé des taux proprement hallucinant d’endorphines, d’ocytocine et de dopamine. A tel point que les gars du labo s’y sont repris à trois fois : Ils pensaient que leurs appareils étaient déréglés ! »
« – Et donc ? »
« – Et bien, pour ta gouverne, ces hormones sont aussi appelées hormones du plaisir. Elles sont secrétées lorsque l’on a du plaisir (quand on mange quelque chose de bon par exemple) ou qu’on est heureux… et, bien-sûr surtout lors des rapports sexuels. En général, elles ne font que du bien mais comme toute chose, à trop forte dose, ça devient néfaste… Et vu les concentrations relevées dans le sang de Julie Cénac, il ne fait aucun doute que son cœur n’a pas pu tenir et a fini par lâcher… Tu te rends compte : cette fille est littéralement morte de plaisir ! »
« – Ouah ! Effectivement, je ne savais même pas que ça pouvait arriver. En tout cas pas à cet âge. »
« – Ouais, pas de chance… Mais franchement, quitte à crever à trente piges, je trouve que c’est quand-même la meilleure des façons, non ? »
« – Mmm, ça se discute mais tu n’as pas fondamentalement tort… Et donc, l’affaire est close maintenant ? »
« – Presque. J’attends le rapport légal mais s’il confirme ces premières conclusions, c’est bouclé. Et de toi à moi, c’est aussi bien comme ça. Je commençais à craindre l’EMD. »
« L’EMD ? Kesako ? »
« – L’enlisement merdique définitif. »
« – Ah d’accord ! »
« – Enfin, voilà, je voulais te prévenir en premier. Je suis désolé de contrecarrer tes plans de petite sauterie, ce soir, mais ce n’est plus la peine que vous vous trituriez les méninges pour rien. »
« – T’inquiète, c’est pas grave. De toute façon, Je n’ai pas l’intention d’annuler quoi que ce soit. Comme je te l’avais dis, j’y allais pour deux objectifs… il en reste un. »
« – Ben voyons ! A part ça, tu n’avais pas de velléités particulières avec la jolie Alex ! Mais tu crois qu’elle sera encore partante malgré la fin de l’affaire Cénac ? »
« – Bah bien-sûr ! Surtout si on ne lui dit rien… »

« – Enfin ! Ca fait une plombe que j’attends. J’ai bien cru que tu t’étais dégonflée ! »
« – Bien-sûr que non mais je ne pouvais pas planter Yannick comme ça. Il a fallu la jouer diplomate… Déjà qu’il n’est pas super emballé par mon boulot alors t’imagines que ça ne le fait pas sauter au plafond de me voir sortir en pleine nuit pour aller jouer aux gendarmes et aux voleurs. »
« – Qu’est-ce que tu lui as raconté ? »
« – Je lui ai dis qu’on allait planquer en vue de démanteler un réseau de prostitution… d’un certain point de vue je ne lui ai pas menti, c’est bien ce qu’on va faire. »
« – Oui, d’un certain point de vue » Approuva Pierre avec un sourire en espérant qu’elle ferait preuve de la même mansuétude lorsqu’elle apprendrait qu’il avait « omis » de lui dire que l’affaire Cénac était bouclée . « – Qu’est-ce que tu fais, là ? » Demanda-t-il en la voyant se contorsionner maladroitement sur son siège.
« – D’après toi ? Tu sais, Yannick n’est peut-être pas très aux faits des pratiques de la police mais, contrairement à ce que tu penses, je le crois assez vif d’esprit pour ne pas gober qu’on part en planque habillée comme une allumeuse… Je te rappelle que tu m’as demandé de m’habiller « sexy »… c’est ce que j’ai fait… mais sous mes vêtements habituels pour ne pas éveiller ses soupçons… vêtements que j’essaye en vain d’enlever depuis cinq minutes… hmmpf !! Ca va le faire… Je vais y arriver… Han ! »
« – Tu veux de l’aide ? »
« – Bas les pattes ! Garde les mains sur le volant, s’il te plait. »
S’il n’avait pas le droit de toucher, Pierre ne se priva toutefois pas de faire converger son regard sur les jolies jambes de sa partenaire tandis que celle-ci tentait péniblement de redonner à sa tenue un minimum de décence en tirant sur l’ourlet de sa robe pour la faire redescendre.
« – Ouah ! Superbe cette petite robe ! C’est bien dommage que tu ne la mettes pas au bureau. T’es splendide là-dedans ! »
« – Ben sûr ! Pour que tous les gars me reluquent le cul à longueur de journée, non merci ! Et je te préviens : Si j’ai suivi tes conseils, c’est juste pour faire plus « couleur locale » et ne pas nous faire repérer mais il est hors de question que j’en fasse plus. J’arrive déjà toujours pas à comprendre comment j’ai fait pour accepter de t’accompagner dans ce plan à la con… Tout ça sans savoir exactement ce qu’on espère trouver… je le sens pas, moi, ce plan. »
« – C’est des bas ou des collants que tu as là-dessous ? »
« – Des bas, pourquoi ? »
Pierre afficha un sourire radieux :
« – Je ne vois pas ce que tu lui reproches, à ce plan. Moi je le trouve extra ! »

Un effort avait été fait sur l’insonorisation : On n’entendait rien de la rue où seul un néon discret indiquait que le club était ouvert.
Une fois acceptés dans le sas d’entrée sous le regard professionnel du vigile, les deux compères perçurent les basses rythmiques à travers la seconde porte.
Ils furent heureux de constater que le patron ne supervisait pas l’accueil. Leur anonymat serait préservé un peu plus longtemps.
L’hôtesse qui les accueillit constituait à elle seule un sacré argument de vente pour l’établissement : Une petite poupée joliment roulée dont la tenue minimaliste laissait la porte ouverte à tous les fantasmes : Un top évanescent laissant apparaître un soutien gorge rouge du plus bel effet et une mini-jupe qui tenait plus de l’accessoire de mode que du vêtement à proprement parler.
Tandis qu’elle encaissait leur entrée, Pierre se dit que si elle participait au show à l’intérieur, il comprenait le succès du club.
Avec un sourire charmeur, elle leur demanda leurs prénoms afin de les inscrire sur les tickets de consommation qui resteraient au bar.
« – Jean-Marc et Ophélia » Répondit aussitôt Pierre en ignorant le hoquet de surprise derrière lui. »
« – Et bien je vous souhaite une très bonne soirée Jean-Marc et Ophélia. Amusez-vous bien. »

Alors qu’ils franchissaient la dernière porte d’accès et étaient assaillis par la musique tonitruante, Alex lui lança en coin :
« – Dis, t’aurais pas pu trouver plus pétasse comme prénom ?! Ophélia… Non mais je rêve ! »
« – Bah, on s’en fout ! » Rigola-t-il. « De toute façon, je suis convaincu que la plupart des clients ne donnent pas leur vrai prénom. »

La boite semblait déjà bien remplie.
A première vue, un œil profane n’aurait pas forcément décelé la particularité du club et aurait pu croire qu’il se trouvait dans une boite de nuit tout à fait normale : Une musique électronique réglée trop fort, une piste de danse bien garnie avec des banquettes tout autour, un bar avec son barman et des clients. Mais c’était justement les clients qui révélaient une première différence : Contrairement à une boite classique, l’âge moyen de la clientèle tournait plus autour de 35 ou 40 ans que 20, 25. Et puis certaines femmes arboraient des tenues qui dans une discothèque lambda leur auraient tout simplement interdit l’accès tant la superficie de peau dénudée s’avérait supérieure à la limite convenable autorisée.
Par ailleurs, à bien y regarder, cette décoration particulière était pour le moins suggestives : Des organes génitaux stylisés sur des tableaux psychédéliques, des moules de bustes féminins dénudés accrochés aux murs… partout le sexe était sinon présent du moins suggéré.

A leur entrée, Pierre et Alexandra se sentirent scannés par un certain nombre de regards scrutateurs.
Les habitués détaillèrent avec intérêt ce nouveau couple : L’homme brun, assez grand, présentait bien, il avait une certaine classe et sa stature athlétique dénotait un corps entretenu ; La femme dont les longs cheveux accrochaient les reflets rouges de l’éclairage tamisé était, elle, vraiment belle.

Pour se donner une contenance, ils s’installèrent sur une banquette libre et Pierre alla immédiatement commander des consommations au bar.
Il revint rapidement avec deux coupes de champagne.

« – Alors, on fait quoi maintenant ? »
« – Pour l’instant rien. On prend nos marques et on observe. » Répondit Pierre en s’installant d’un air satisfait au fond de sa banquette et en portant un œil intéressé sur la piste de danse.
« – Dis, si le but du jeu était de venir mater, t’aurais pu te passer de ma présence, tu sais. »
« – T’impatiente pas, ma belle. Je suis persuadé que ta présence nous sera des plus précieuses. »
« – T’espère franchement trouver le tueur de cette manière ? »
« – Non, ce serait vraiment inespéré… Mais ouvre l’œil, on ne sait jamais… un détail, une incohérence pourraient nous mettre sur la voie… » Répondit il, l’air faussement accaparé par un point lointain. Il se doutait que lorsqu’elle saurait qu’il l’avait amenée ici de plus ou moins bon gré alors que l’affaire était résolue et qu’il n’y avait aucun suspect à rechercher, elle lui ferait une scène.
Le plus tard serait donc le mieux.

Pierre scrutait danseurs et clients assis tout en buvant son verre à petites lampées.
Comme il s’agissait d’une soirée « spécial couples », il savait qu’il aurait moins de chance de trouver les professionnelles recrutée pour les soirées « pluralité masculine » dont lui avait parlé Lebris mais il s’attachait à déceler d’éventuelles « accompagnatrices » parmi la clientèle féminine.
Il dut toutefois admettre que ce n’était pas si facile. Même si certaines jeunes femmes semblaient bien moins âgées que leur partenaire, rien n’indiquait que ce ne fut pas des couples légitimes ou, du moins, des couples aussi légitimes que celui qu’il formait avec Alex.
Comme l’avait suggéré Lebris, seul un habitué pourrait se rendre compte que la même fille venait à chaque fois avec un homme différent.
En attendant, joignant l’utile à l’agréable, il se rinçait l’œil. Car quelques beaux spécimens court vêtues se déhanchaient sur la piste.
Si Alexandra avait sans doute déniché sa robe la plus dévergondée pour l’occasion, celle-ci faisait figure de robe de communiante vis-à-vis de certaines draperies vaporeuses cachant à peine les charmes de quelques pulpeuses aguicheuses.

Sentant une certaine tension lui envahir le pantalon, Pierre proposa d’aller faire un premier tour de repérage dans les « coins câlins », histoire de distraire un peu son attention.
« – Si tu veux » Bougonna une Alexandra peu enthousiaste qui saisit néanmoins la main tendue.
Ensemble, ils se dirigèrent vers l’entrée discrètement dissimulée par un trompe l’œil.

« – Dis ? On est obligés de se tenir par la main ? »
« – Ben ça fait plus couple, non ? »
« – Ca fait surtout plus tarte, je trouve. »

En ce début de soirée, les alcôves du premier étage étaient pour la plupart désertes. Seule une pièce fermée laissait échapper des bruits suggestifs.
Pierre jeta un œil par un hublot indiscret : Un couple était en pleine action.
Il avait beau avoir visionné bon nombre de films pornographiques notamment dans le cadre d’un métier qui l’avait aguerri à toutes sortes de perversions, la vue des ces deux corps dénudés qui s’adonnaient au plaisir sans aucune pudeur troubla le responsable de la brigade.
Alex le rappela à la réalité d’un ton ironique :
« – Je t’apporte un fauteuil pour que tu t’installes ou on peut continuer ? »

Au deuxième, il n’y avait pas âme qui vive. Les équipements plus « spécifiques » devaient n’être utilisés qu’en fin de nuit, lorsque les esprits étaient suffisamment échauffés.
Seule la pièce du fond était condamnée et « interdite au public ». Ils étaient bien placés pour savoir pourquoi.
Alex et Pierre ne croisèrent que des couples qui, comme eux, « visitaient » les lieux.

Alors qu’ils regagnaient leurs sièges, un couple vint s’asseoir juste à côté d’eux et la jeune femme blonde les entretint immédiatement :
« – Vous, vous êtes des petits novices, n’est-ce pas ? »
« – Qu’est-ce qui vous fait dire ça ? »
« – Ca fait un petit moment qu’on vous observe avec mon mari et on s’est dit tous les deux que vous deviez être des petits nouveaux avec vos yeux curieux, qui ont l’air de tout découvrir et on vous a vu partir main dans la main pour affronter ensemble « le côté obscur de la force ». Vous étiez si mignons ! »
Pierre ignora volontairement le regard d’Alex qui lui lançait muettement « je te l’avais bien dit ! » et confirma :
« – Oui, en effet, c’est notre première fois… On s’est décidé à sauter le pas. »
« – Et bien félicitation, c’est courageux de votre part. J’espère que vous passerez une super soirée qui vous donnera envie de revenir… Au fait, moi c’est Jenny et le grand escogriffe qui me sert de mari, c’est Frédéric, que tout le monde appelle Fred, allez savoir pourquoi ! »
« – Enchantés, nous c’est Ophélia et Jean-Marc. »
« – Ophélia ? Tiens donc… » S’étonna la blonde avec un sourire en coin.
Agacée, Alex intervint :
« – Laisse tomber Ophélia. C’est ce grand couillon qui a tenu à nous affubler de pseudos ridicules : Moi c’est Alexandra (Alex) et lui c’est Pierre ! »
Ce qui eut le don de faire éclater de rire leur interlocutrice.
« – Ne t’inquiète pas, c’est monnaie courante, ici, les faux prénoms, surtout pour les débutants… »
« – Ah ! Tu vois : Je te l’avais dit ! »
« -… mais nous, c’est bien jenny et Fred. Alors, racontez-nous d’où vous venez et ce qui vous a conduit au libertinage. J’adore entendre les histoires de couples… mon côté commère, sans doute ! »

Pierre écouta avec étonnement Alexandra dérouler une histoire assez vraisemblable d’un couple qui, à l’aube de la quarantaine, cherche à pimenter sa vie sexuelle.
Ils n’avaient rien préparé à ce sujet et la facilité avec laquelle elle réussit à inventer ça en totale improvisation le bluffa.
Il se garda d’ailleurs bien d’intervenir pour ne pas commettre d’impair.

Très vite, le deux filles nouèrent une conversation animée et semblèrent se trouver des atomes crochus.
Pierre s’en félicita. Au moins, ça avait eu le mérite de dérider sa partenaire.
Sans en avoir l’air, il observait le couple de trentenaires : Fred était grand, au moins 1m90, blond-roux, son visage poupin était parsemé de taches de rousseurs. Bien qu’il participât peu à la conversation, il n’en perdait pas une miette et il paraissait évident qu’Alex lui avait tapé dans l’œil : Il ne ratait pas une occasion de la dévorer des yeux et de laisser son regard glisser le long de ses courbes avenantes, notamment au niveau de la poitrine que la belle Alex avait nettement plus généreuse que sa femme.
Bien que s’exprimant dans un français parfait, Jenny parlait avec un très léger accent qui semblait indiquer que ce n’était pas sa langue maternelle. Indication confirmée pas son physique indéniablement scandinave : Grande et filiforme, ses yeux bleus malicieux éclairaient un visage harmonieux encadré par des cheveux d’un blond presque blanc coupés courts. Indéniablement une jolie fille malgré son physique androgyne et Pierre pouvait comprendre qu’elle ait un certain succès dans le monde de la nuit. Lui-même se sentait irrémédiablement attiré par son charme nordique.
Comme Alex, elle avait adopté une tenue légère mais classe : une jupe qui lui descendait à mi-cuisse et un top en lycra gris pailleté suffisant moulant pour suggérer que sa poitrine menue n’avait aucun besoin de soutien.

« – J’ai envie de danser » Décréta-t-elle soudain « vous venez ! ? »

Ca faisait belle lurette que Pierre n’avait pas dansé en boite. Sans doute pas depuis ses débuts avec Christelle, sa première femme, ce qui devait remonter à … ouh-la ! Mais même si la programmation musicale du soir n’avait rien de commun avec le bon vieux pop rock qu’il affectionnait, il réussit néanmoins à adopter un balancement du bassin qui ne devait pas avoir l’air trop ridicule.
Alexandra, elle paraissait bien plus à son aise, sans toutefois égaler les déhanchements suggestifs de la blonde Jenny qui offrait à son mari (et à l’assistance) un véritable petit show sensuel.

Ils dansèrent pendant un bon moment jusqu’à ce que la soif les ramène vers leur coin attitré. Chaque couple offrit sa tournée et Pierre remarqua que les bulles alcoolisées commençaient à faire effet sur Alex qui semblait de plus en plus détendue. Elle ne s’offusqua même pas de voir quelques congénères danser sur la piste en adoptant le style monokini normalement dévolu aux plages sudistes.
Un spectacle somme toute réjouissant qui semblait tout à fait convenir aux mâles alentour.

Ce qui donna sans doute des idées à Fred :
« – Je parie que maintenant que la soirée est un peu plus avancée, vous mourez d’envie de retourner dans les coins câlins voir ce qu’il s’y passe… On y va ? »
Pierre et Alex acquiescèrent et suivirent docilement le couple qui avait définitivement décidé de leur servir de chaperons.

De toute évidence, l’ambiance avait monté d’un cran, à l’étage. Une part non négligeable de la population avait déserté la piste de danse pour migrer vers les quartiers « hot ».
Presque toutes les alcôves étaient occupées et les sons qui s’en échappaient indiquaient clairement que l’on ne s’y ennuyait pas.
Les lumières volontairement tamisées laissaient deviner des corps nus enlacés dans une atmosphère feutrée peuplée de soupirs de plaisir ou de cris d’extase.

Alexandra qui s’attendait à tomber sur une partouze géante fut étonnée de découvrir un spectacle plus sensuel que pornographique même si les actes sexuels étaient loin d’être simulés.

Ils continuèrent et grimpèrent au second étage et rejoignirent un petit groupe de voyeurs qui observaient un quatuor en pleine action : Une très belle jeune femme totalement nue était Installée sur un fauteuil de gynécologue, les pieds calés dans les étriers, les jambes écartées, la vulve offerte aux caresses buccales d’une autre femme, nue elle aussi. Leurs deux hommes se tenaient à hauteur de sa tête et elle branlait leurs sexes en érection ou les avalait alternativement quand des gémissements de plaisir ne la perturbaient pas.
Sur un signe de la butineuse, un des deux hommes fut invité à la remplacer entre les jambes de la « suppliciée ». Avec une habileté dénotant une certaine habitude, il enfila un préservatif et, sans tarder, plongea son pénis dans la fente placée à la hauteur idéale.
Troublés, Pierre et Alex regardèrent l’homme musclé besogner activement sa partenaire d’un soir qui continuait à se faire caresser par son homme et la seconde femme.
Ils auraient sans doute eu du mal à l’admettre mais devant ce tableau torride, ils avaient totalement perdu de vue la raison de leur présence ici. Ils n’étaient plus des agents de l’ordre public en mission mais un homme et une femme hypnotisés par un spectacle au pouvoir érotique indéniable.

Jetant un regard de côté, Pierre remarqua que Fred et jenny n’étaient pas non plus insensibles à la représentation offerte par le quatuor : Se tenant dans le dos de sa femme, Fred laissait ses mains courir amoureusement sur le buste de jenny. Celle-ci avait les mais placées derrière elle et semblait vérifier l’effet que tout cela procurait sur l’anatomie de son mari.
Nul doute que la jeune scandinave rêvait de se retrouver sur le fauteuil, livrée aux attentions d’un trio infernal… Et, dans cette optique, Pierre se voyait volontiers jouer le rôle du pourfendeur…
Un autre coup d’œil permit à Pierre de constater le trouble d’Alex : Malgré la pénombre, il décela une certaine rougeur au niveau de sa gorge.
La jolie rousse sentait-elle ses bonnes résolutions fondre comme neige au soleil ?
Peut-être car ce fut elle qui donna le signe du départ alors que les deux amants venaient de crier leur jouissance dans un bel ensemble.

Lorsque les quatre compagnons redescendirent, la musique avait ralenti, jenny s’écria : « Chouette ! Les slows ! Tu viens chéri ! »
Fred la suivit de bon gré tandis que Pierre et Alex les imitaient.

Arrivé sur la piste, Pierre ouvrit les bras pour inviter Alexandra à s’y lover. Celle-ci ne put réprimer un sourire : « – Ne prend pas ton air faussement désolé : Je sais parfaitement que ce moment fait partie des petits à-côtés agréables sur lesquels tu comptais en venant ici avec moi. »
Pierre joua l’offusqué :
« – Oh ! Quelle bien piètre opinion tu as de moi ! Loin de moi cette idée ! »
« – Tu m’en diras tant ! » Maintint-elle tout en acceptant quand-même sans mauvaise grâce de se pendre à son cou.

Non contents de s’enlacer amoureusement, Fred et Jenny, visiblement très échauffés par l’ambiance du lieu s’embrassaient à bouche que veux-tu juste à côté d’eux.
Ce qui conduisit Pierre à remarquer :
« – Dis-donc, si on veux passer pour un vrai couple, il faudrait peut-être faire comme eux non ? »
« – Ha ! Ha ! Ha ! Je ne sais pas pourquoi mais je l’attendais celle-là ! »
« – Ben quoi, c’est vrai. En plus ce n’est pas comme si on ne l’avait jamais fait : Souviens-toi… Il y a quelques années tu ne disais pas non ! »
« – Oui, mais comme tu sembles avoir bonne mémoire, tu dois aussi te rappeler qu’à l’époque, j’étais libre. Ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. »
« – Bah évidemment ! Si tu t’arrêtes aux petits détails maintenant… »
« – Je suis certaine que Yannick sera heureux de s’entendre traiter de « petit détail ». »
« – J’croyais que tu ne voulais pas tout lui dire ? T’es pas obligée de lui raconter comm… »
« – Arrête de parlementer, tête de lard, et embrasse moi ! » L’interrompit-elle en approchant ses lèvres qui dévoilaient un sourire canaille, preuve qu’elle le faisait marcher depuis un petit moment.
Mais elle suspendit son geste au dernier instant :
« – Ne te fais quand-même pas trop d’illusions : c’est tout ce que tu obtiendras de moi ce soir. »

Pierre qui n’en espérait déjà pas tant n’insista pas, tout à son bonheur de retrouver le délicieux contact des lèvres fraiches de sa coéquipière dont il réalisa que, depuis tout ce temps, il n’en n’avait pas oublié le goût.

Ce qui devait être un baiser d’apparence se révéla tout sauf factice.
Sans doute elle aussi troublée par l’atmosphère sensuelle omniprésente, Alexandra ne retenait visiblement pas son plaisir d’embrasser son partenaire et sa petite langue se démenait sous le palais de Pierre, procurant à celui-ci des frissons qui lui descendaient jusqu’en bas du dos.
Il ne boudait pas son plaisir, lui non plus. Et l’enthousiasme d’Alex le poussa à s’enhardir, à la serrer d’un peu plus près et de laisser ses mains s’égarer un peu plus bas que le niveau de la taille…
Elle ne stoppa son geste que lorsqu’il atteignit ses belles rondeurs fessières et le temps qu’elle mit à réagir alors lui indiqua qu’elle n’était pas si rétive que ça.
Mais il ne put confirmer son impression : Alors que le morceau de musique s’achevait pour être suivi par un autre, Fred leur lança : « – On échange les cavalières ? » et sans attendre réellement de réponse, il enlaça Alexandra tandis que Jenny prenait sa place dans ses bras avec un grand sourire.

« – Ta femme plait beaucoup à mon homme. »
« – Oui, de toute évidence… » Admit Pierre avec un hoquet de surprise. Ils n’avaient changé de cavalière que depuis deux minutes qu’il voyait déjà l’autre couple se rouler une gamelle digne de lycéens en manque.
La situation prenait soudain une tournure bien étrange.
Bien qu’il n’en ait aucun droit, il sentait une pointe de jalousie l’étreindre à la vue de l’étroite et rapide complicité qui naissait entre sa coéquipière et le bel inconnu.
« – C’est normal : Elle est très belle… Et elle a de très beaux seins… Moi j’ai de tous petits nénés… »
« – Ah ! Les femmes et leurs complexes ! C’est bien aussi les petits seins, c’est mignon. En tout cas, moi j’aime bien. »
« – Tant mieux… Parce que tu me plais bien aussi. »
Et avant qu’il puisse réaliser, elle jeta sa bouche sur ses lèvres.

Pendant les minutes qui suivirent, Pierre ne pensa plus du tout à ce qui se passait entre Alex et Fred.

Mais lorsqu’il redescendit sur terre, la situation avait nettement évolué entre leurs compagnons et Pierre eut une autre raison d’être jaloux : De toute évidence, Alex permettait à son nouveau cavalier beaucoup plus de largesses qu’elle n’en avait accordé au premier : Alors que leurs lèvres ne se quittaient plus, les mains du grand blond avaient eut le droit d’investir la croupe de sa partenaire mais sous la robe, cette fois, faisant nettement remonter celle-ci et offrant à l’assistance une vue parfois dégagée sur les blanches fesses de la policière.
Même si cela semblait monnaie courante ici et que personne ne paraissait remarquer le jeu des deux compères à part lui, Pierre n’en revenait pas qu’Alex se laisse faire ainsi.
D’autant que Fred ne semblait pas se satisfaire de cet avantage : Ses mains partaient à l’aventure sur le corps de la jeune femme, venant caresser le galbe d’un sein ou partant se perdre entre leurs deux corps serrés l’un contre l’autre, cherchant à s’approcher de la zone la plus « sensible ».

Presque par mimétisme, il fit glisser ses doigts le long de la taille de la belle Jenny et il frissonna d’aise lorsqu’il rencontra la douceur de ses cuisses nues.
Remontant légèrement, il s’attendait à être stoppé d’un moment à l’autre mais sa cavalière semblait apprécier et ses mains purent bientôt, à leur tour, empaumer deux lobes bien fermes, nus eux aussi, ne rencontrant que bien tardivement la ficelle du string qui allait se perdre dans le sillon fessier.
Lui aussi devait offrir aux regards extérieur une belle vue sur le postérieur de Jenny mais celle-ci ne fit pas mine de s’en offusquer. Au contraire, elle se faisait chatte, se lovant langoureusement contre lui, frottant son ventre contre son bas ventre…
Pierre réalisa soudain qu’il avait une trique d’enfer.
Un émoi qui ne trouva aucune raison de se calmer lorsqu’il coula un regard vers le couple voisin…

Manifestement, la main que Fred avait glissée entre lui et Alex avait atteint son but. La jeune femme se tortillait sous l’emprise d’une douce torture dont Pierre devinait à peu près la nature.
La relation entre ces deux là avançait à une vitesse incroyable !

Mais alors que Fred glissait un mot à l’oreille d’Alex le plus étonnant fut de voir celle-ci acquiescer et se laisser entrainer par la main vers le couloir obscur sans même un regard vers Pierre.
Au passage, l’homme empocha discrètement une poignée de préservatifs mis à disposition dans une corbeille au coin du comptoir.
Bien qu’il pensât que le grand blond faisait preuve d’un optimisme excessif quant à la docilité à venir de sa coéquipière, Pierre ne put encore une fois réprimer un coup au cœur en pensant à ce que l’utilisation de ces accessoires impliquait.
Il n’avait jamais porté Yannick, le mari d’Alex, dans son cœur mais en la voyant ainsi partir au bras de ce grand échalas, il éprouvait un certain malaise à penser qu’il allait peut-être être l’artisan de la première infidélité de la droite et intègre Alex.
Et quelque par, même s’il ne voulait pas l’admettre, il regrettait aussi que cette infidélité de se fasse pas à son profit.

Jenny qui n’avait rien perdu du jeu entre les deux tourtereaux proposa alors sans détour :
« – On y va aussi ? »
Comment dire non à ça ?
Et surtout : Pourquoi dire non ?

Ils ne mirent que deux ou trois minutes à trouver dans qu’elle chambre leurs compagnons s’étaient isolés mais lorsqu’ils les rejoignirent, ceux-ci avaient depuis longtemps cédé à leur empressement : Couchée sur le dos, la robe remontée au dessus de la poitrine, les jambes largement écartées avec sa culotte tirebouchonnée sur un mollet, Alex serrait la tête de Fred contre son entrejambe, recevant à grand renfort de soupirs un hommage buccal particulièrement appuyé de la part de son partenaire.

Ne réalisant pas que c’était la première fois que Pierre voyait sa coéquipière dans son plus simple appareil, qui plus est dans un une position des plus compromettantes, Jenny l’entraîna près du lit et s’assit tout près du couple en action.
Doucement, elle s’allongea à côté d’Alexandra et elle finit de lui retirer complètement sa robe puis, d’un geste délicat, elle caressa le buste dénudé, dessinant des arabesques invisibles sur la peau perlée de sueur et passant tendrement la pulpe de ses doigts sur les pointes érigées des mamelons rose pâle.
Puis, tout doucement, elle se pencha, prit un téton entre ses lèvres et le suça délicatement.
Alex frémit sous la double sollicitation. Elle gémit et Pierre vit ses muscles se tendre dans l’imminence d’une première vague de plaisir.

Jenny était décidément pleine de surprise.
Mais cela étonna à peine Pierre lorsque les lèvres de la jeune femme quittèrent le téton maintenant fièrement dressé pour rejoindre la bouche grande ouverte de la policière.
Ce qui le surprit plus, fut par contre de constater l’entrain avec lequel Alexandra répondit à ce nouveau baiser.
Voir céder aussi rapidement toutes les barrières de la prude Alexandra ne cessait de l’étonner.

Jenny était pleine de surprise mais aussi pleine de ressources.
Alors qu’il avait du mal à détourner son regard du baiser échangé entre les deux femmes, tableau hautement érotique s’il en était, il sentit soudain une main légère se glisser dans le dos de la jeune femme et s’attaquer habilement à la braguette de son pantalon.
Ladite petite main plongea ensuite rapidement dans l’ouverture et alla tâter sans vergogne les effets toujours aussi évidents de son émoi pelvien.

« – Excuse-moi, ma belle, ta langue est bien savoureuse mais je sens dans mon dos quelque chose de long et dur qu’il me tarde de découvrir et de m’occuper… »

En moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, Pierre se retrouva couché sur le dos et le pantalon au bas des chevilles.
Jenny couvait d’un regard gourmand l’énorme bosse qui déformait son caleçon et, comme la patience ne semblait pas être la première de ses qualités, elle se jeta dessus comme une affamée et le sous-vêtement rejoignit rapidement le pantalon, dévoilant un mat dressé haut et fier.
« – Le fauve est lâché ! » Plaisanta-t-elle.

Oui, et le fauve fut caressé, cajolé par une petite main décidément bien experte… Avant que des lèvres fraiches viennent s’y poser délicatement… relayées par une petite langue agile.
L’homme soupira d’aise lorsqu’il sentit son membre gobé, aspiré par sa ravissante suceuse.

Les yeux fermés, concentré sur les délicieuses sensations qui lui étaient procurées, Pierre était aux anges.
Il ne remarqua même pas à quel moment Jenny avait enlevé son string, ni quand elle lui avait enfilé un préservatif.
Il ne découvrit son sexe encapuchonné que lorsqu’elle l’abandonna pour se redresser.
Sans hésiter et sans attendre, elle se positionna au dessus de lui, saisit son pénis d’une main et le guida en elle tout en s’affaissant lentement. Ce faisant, elle ne l’avait pas quitté des yeux, se mordillant la lèvre inférieure au moment de la pénétration.
Haletante, elle ne stoppa la lente progression que lorsque leurs pubis se rejoignirent.
« – Vous êtes très gros, monsieur. » Murmura-t-elle alors à son oreille.
Ils restèrent comme ça quelques instants. Malgré la fine barrière de latex, Pierre sentait les muscles du vagin de sa partenaire palpiter contre son membre… La sensation était divine.
Puis, imperceptiblement, elle amorça un léger mouvement du bassin.
Pierre sut qu’il allait prendre un pied d’enfer.

Son seul regret était de ne pas voir sa partenaire nue.
Comme si elle avait lu dans ses pensées, elle se redressa et fit alors passer ses vêtements par-dessus ses épaules, s’offrant enfin en pleine nudité.
Pierre découvrit avec plaisir ses seins d’une taille effectivement réduite mais bien faits.
Il savait déjà qu’il allait adorer les voir tressauter lorsque le rythme s’emballerait.
Plus bas, son regard s’attarda sur le ventre plat et sur le sexe totalement glabre dont les lèvres étaient déformées par l’intromission invasive de l’imposante colonne de chair.
Il voyait les abdos de sa partenaire se contracter et il en ressentait les effets immédiats autour de son membre introduit.

C’est alors qu’une main vint lui saisir la sienne et qu’un cri retentit à ses côtés : Fred venait lui aussi de s’enfoncer jusqu’à la garde…

Depuis le début du trajet, ils n’avaient quasiment pas échangé un seul mot.
Chacun était perdu dans ses pensées, revivant de son côté l’incroyable nuit qu’ils venaient de vivre.

Pierre avait pris un panard démentiel.
Il avait adoré voir la jolie Jenny crier sous ses coups de boutoirs. Il avait adoré entendre les deux jeunes femmes chanter leur plaisir à l’unisson.
Finalement, la jalousie qu’il avait éprouvé au début envers Fred avait fait long feu, emportée par le maelström de sensations et de plaisir.
Il n’avait pas non plus été troublé plus que ça par les voyeurs qui s’étaient succédé à l’entrée de la chambre, profitant du magnifique spectacle offert par les deux couples. Il les avait même carrément zappés.
Ca avait été une expérience unique et ils avaient remercié leurs partenaires pour cette découverte.
Bien évidemment, ils n’avaient rien appris qui pouvait aire avancer leur enquête… mais cela passait pour l’instant au second plan. Il serait temps d’y repenser plus tard.
En parlant d’y repenser plus tard, Pierre se demandait quand-même comment Alexandra allait gérer ce qui lui été arrivé dans ce club.
Au vu des cris qu’elle avait laissé échapper, elle ne pouvait pas nier qu’elle aussi avait pris un sacré pied. Fred était manifestement un bon amant et Pierre restait encore troublé par la découverte de la manière dont celle qui était encore sa collègue exprimait son plaisir sexuel.
Même s’ils n’avaient finalement rien fait tous les deux, cette partie carrée conférait à leur collaboration une intimité particulière et pour le moins inédite.
Cela ferait sans doute bizarre de se retrouver le lundi matin au bureau, à la lumière du jour.

Suivant sans doute le même cheminement de pensée, Alexandra déclara soudain :
« – Si quelqu’un du service ou pire, Yannick, a, un jour, vent de ce qui vient de se passer dans cette boite, je te tue. »

Il ne répondit pas. Il savait qu’elle n’attendait pas de réponse.
De toute façon, elle savait qu’il ne dirait rien.

Le silence se réinstalla entre eux, lourd, pesant. Chacun repartit dans ses pensées, revivant encore et encore les points forts de la soirée.
Pierre fut presque soulagé lorsqu’ils arrivèrent devant chez elle.
Il était trois et demi du matin, le quartier résidentiel dormait profondément, pas une lumière aux fenêtres.
Alexandra ne descendit pas tout de suite. Pierre sentit qu’elle voulait encore dire quelque chose mais que ça avait du mal à sortir. Il attendit patiemment.
Mais elle ne dit rien de plus, elle se pencha vers lui pour lui faire la bise puis tout bascula sans que Pierre ne comprenne quoi que ce soit.
Au lieu de viser sa joue, les lèvres de la jeune femme se jetèrent sur sa bouche.
Interloqué, il mit quelques secondes avant de lui rendre son fougueux baiser.

Puis tout s’enchaîna très vite, Pierre se sentit comme spectateur de ce qui se passa ensuite.
Tout en continuant à l’embrasser, Alex lança ses mains à l’assaut du corps de son supérieur, sur ses épaules, sa poitrine, son ventre… son entrejambe…
Malgré la nuit qu’il venait de passer (ou à cause d’elle, peut-être), il sentit son sexe réagir immédiatement à la sollicitation et se dresser fermement.
Sans perdre de temps et semblant prise d’une soudaine frénésie, la jeune femme se déplaça agilement dans l’habitacle exigu et vint se placer à califourchon sur les jambes du conducteur. Pierre sentit son membre glisser sans rencontrer de résistance dans un fourreau idéalement lubrifié.
Manifestement, la coquine n’avait pas trouvé utile de remettre ses sous-vêtements.

Alexandra gémit tout en s’empalant rapidement sur le pieu dressé.
Puis elle commença à onduler du bassin pour très vite se lancer dans une vigoureuse chevauchée.
Les mains posées sur les hanches de sa partenaire, Pierre ne pu qu’accompagner le mouvement de plus en plus frénétique, de plus en plus saccadé. Il pressentit que la jouissance allait être fulgurante et sensationnelle.

Et elle le fut.

Mais ce ne fut qu’au moment ou il s’épanchait tout au fond de la petite cavité brulante qu’il réalisa qu’ils avaient omis un détail d’importance : Le préso !
Toutefois, cela ne semblait pas chagriner Alexandra. Gémissante et encore haletante, elle reprenait doucement son souffle, collée à lui, le visage calé dans son cou.

Puis, une fois que ses muscles vaginaux eurent expulsé l’organe reproducteur qui avait perdu une grande part de sa superbe, elle se réinstalla sur son siège comme si de rien n’était.

Vérifiant sommairement sa tenue, elle ouvrit la portière et répondit à la question que Pierre n’osait formuler.
« – Parce que comme ça, s’il a vent de quelque chose, c’est Yannick lui-même qui se chargera de te tuer. »
Et elle descendit de la voiture.

Mais après avoir fait le tour du véhicule, elle lui fit signe de baisser la vitre :
« – Et aussi parce que j’en avais envie. »
Elle lui colla un ultime bécot sur les lèvres et partit sans plus se retourner.

Pierre mit cinq bonnes minutes à réaliser qu’il devait maintenant redémarrer et reprendre la route.

Lundi matin gris à la brigade.
Lorsque la sonnerie du téléphone retentit à peine 8 heures sonné, Pierre connaissait déjà l’identité de son correspondant.
« – Salut Philippe, comment va ? »
« – Salut, comment ça va pour toi ? Le week-end a été calme je suppose. Pas trop dormi vendredi soir, non ?
« – Non, en effet, la nuit a été courte. »
« – Et alors ? »
« – Et alors quoi ? »
« – Arrête de faire semblant de ne pas comprendre : Tu te l’es faite ? »
« – Misère ! Moi qui pensais que tu m’appelais de si bon matin pour savoir si mon enquête avait progressé ! »
« – Je me fous royalement de ton enquête, mon grand. D’ailleurs je suis persuadé qu’elle n’a pas avancé d’un pouce. Par contre, je veux savoir comment ça s’est passé avec Alex. Tu sais que cette histoire a boosté ma libido de façon incroyable, ce week-end. Ca faisait longtemps que ma femme n’avait pas été aussi comblée. »
« – Tu m’en vois ravi. Et elle était contente ? »
« – Qui ? »
« – Ben ta femme, banane ! »
« – On s’en fout, c’est pas le sujet ! Alors, tu te l’es faite oui ou non ? »
« – Ah ça. J’peux pas te le dire. Secret professionnel. »
« – Donc tu te l’es faite. »
« – Mais puisque je te dis que ne peux rien te dire. »
« – L’enfoiré, il se l’est tapée ! Le gros veinard ! Allez, raconte, j’veux des détails ! »
« – Non mais pis quoi encore. Depuis quand je te dois des comptes sur ma vie sexuelle ? Ca va pas non ! »
« – Oh merde, fais pas le chien ! J’ai bandé tout le week-end rien qu’en pensant à ce que vous alliez faire, tu peux bien m’en dire un peu plus ! »
« – Ben non justement. Et puis, à mon avis, quand on confronte ses fantasmes à la réalité ça perd tout son charme. Tu ne préfères pas plutôt continuer à bander et à combler ta femme ? Bon d’ailleurs, je vais devoir te laisser car comme dit le dicton, quand on parle de la louve, on en voit la croupe… à plus ! »

Alexandra entra dans son bureau avec une feuille à la main. Son visage fermé n’augurait rien de bon pour Pierre qui se demandait toujours comment elle allait digérer ses « incartades » de vendredi.
Il prévoyait un retour au quotidien un peu délicat.
Ce qu’il n’avait pas prévu par contre, c’était la baffe monumentale et sans sommation qu’il se prit en pleine poire.
Rouge d’une colère à peine contenue, elle lui brandit la feuille d’impression sous le nez :
« – Tu comptais me le dire quand ? »
« – Je ne comprends pas. »
« – Julie Cénac n’a pas été assassinée ! Tu le sais depuis vendredi midi et tu ne m’a rien dit ! » Continua-t-elle en secouant nerveusement le rapport et en haussant le ton. « T’as préféré me cacher ça pour pouvoir aller avec moi à ton plan pourri alors qu’on n’avait plus rien à y faire ! J’ai vraiment l’impression que je me suis fait baiser dans tous les sens du terme !! »
« – Tout doux ma jolie ! » Répondit Pierre tout en massant sa jour gauche encore anesthésiée par l’impact de la gifle. Le moins que l’on pouvait dire, c’était qu’elle avait un sacré coup droit. « Ok, ok, je suis désolé, j’aurais dû te le dire… Mais je savais que tu ne voudrais plus y aller alors que contrairement à ce que tu viens de dire, il y avait encore du taf et notamment élucider un peu cette histoire de prostitution plus ou moins organisée. Ok, j’ai merdé sur ce point. Mais après, ne viens pas m’accuser du reste : Ce n’est pas moi qui t’ai poussée dans les bras du beau Fred, ce n’est pas moi qui t’ai obligée à le suivre dans la chambre et je ne parle même pas de ce qui s’est passé ensuite dans la voiture… Je veux bien comprendre que ce soit difficile à digérer à la lumière du jour mais ne viens pas me faire porter tous les chapeaux à ta place. D’autant que d’après ce dont je me souviens, tu ne peux pas te targuer de n’y avoir pris aucun plaisir. Loin s’en faut ! »

Alexandra le fusilla du regard. Il crut bien qu’il allait s’en manger une deuxième.
Mais elle tourna les talons et partit en claquant la porte :
« – J’te déteste !! »

C’était vu : Ca passait mal.

Il savait qu’elle allait revenir.
Ca prendrait le temps qu’il faudrait mais elle allait revenir… Une heure plus tard, ou deux… ou quatre.

Et elle revint.
Avec sa mine boudeuse caractéristique, son air buté qui disait : « Je sais que je suis allée trop loin, une baffe à un supérieur, c’est pas tolérable et je sais aussi que ce que tu m’as dis après n’était pas totalement faux mais il est hors de question que je l’admette à haute voix. »

« – Bon qu’est-ce qu’on fait maintenant ? »
Pierre ne chercha pas à enfoncer le clou. Le seul fait de revenir vers lui, la queue basse, représentait un véritable effort de la part de sa subordonnée et il savait qu’il avait tout intérêt à la laisser enterrer la hache de guerre.

« – A quel sujet ? »
« – Ben au sujet de la mort de Julie Cénac, pardi ! »
« – On sait de quoi elle est morte. Qu’est ce que tu veux qu’on fasse de plus ? »
« – Ben j’chais pas mais elle peut-être pas morte comme ça, tout d’un coup. Si ça se trouve elle a suffoqué, appelé à l’aide… Si les mecs ont continué à se tirer la nouille devant elle sans se préoccuper de son malaise il y aurait de quoi en inculper un ou deux de non assistance à personne en danger, tu ne crois pas ? »
« – Peut-être mais ce n’est visiblement pas l’intention de Davoust : Il avait tellement peur que les grosses légumes lui tombent dessus à bras raccourci qu’il est bien content que ça se termine ainsi et il n’a vraisemblablement pas envie de jouer les prolongations. Pour lui, une jeune nympho qui clamse de plaisir c’est bien plus commode que de devoir aller farfouiller dans les petites affaires d’un attaché parlementaire. »
« – Et ça te convient ? »
« – Pas plus que toi mais c’est son enquête, plus la mienne… Et puis je le comprends : Outre les difficultés à identifier tous les participants à la « tournante », il faudrait en plus pouvoir prouver cette fameuse « non assistance ». Ils auront beau jeu de dire que la fille semblait juste évanouie de plaisir.
« – Mouais. Et concernant l’éventuelle prostitution organisée ? »
« – Alors là c’est autre chose ! On ne lâche rien et on continue à creuser le sujet… mais sans vouloir remuer le couteau dans la plaie, j’imagine que pour une deuxième visite à l’exotix, c’est mort ? »
« – Détrompe-toi ! Ce n’est pas mort du tout… mais cette fois, ce sera selon mon plan et mes règles, ok ? »
« – Comme tu veux. »

« – Au fait ! Ca n’a sans doute plus vraiment d’importance maintenant, mais on a reçu les résultats de la recherche sur Xavier Lebris : Il était effectivement dans le fichier mais il n’aurait pas dû l’être. »
« – Comment-ça ? »
« – Il y a trois ans, sa femme a porté plainte pour viol conjugal. Des prélèvements ont été faits et enregistrés dans la banque de données centrale avant que la « victime » ne se rétracte finalement.
Les poursuites ont été stoppées et il n’y a pas eu de procès mais bizarrement, les données qui auraient dues être effacées ne l’ont pas été. »
« – Bizarre, en effet… Et encore plus bizarre que le gus soit au courant de ça et ne fasse rien pour laver son casier judiciaire. »
« – Il ne sait peut-être pas qu’il peut le faire. »
« – Sans doute… J’y réfléchirai en temps voulu mais pour l’instant, comme tu l’as dit toi-même : Cela ne nous regarde plus. »

Pierre commençait à trouver le temps long.
Ca faisait maintenant une bonne demi-heure qu’Alexandra aurait dû être arrivée et il était toujours à poireauter tout seul à sa table, comme un con.
Quelle idée aussi de vouloir venir séparément !

C’était ça l’idée d’Alex : Ils retourneraient à l’Exotix mais chacun de son côté et en faisant semblant de ne pas se connaître.
Selon elle, ça permettrait de se concentrer sur l’enquête et éviterait les dérapages comme celui qu’ils avaient connu la dernière fois.
Selon lui, ça n’éviterait rien, bien au contraire !
Considérée comme une femme seule, sa comparse allait devoir subir les avances plus ou moins lourdingues de tous les morts de faim du coin. Surtout que contrairement à la dernière fois, ce soir était une soirée mixte et on voyait bien la différence : Les mecs représentaient la grosse majorité de la clientèle.
L’avantage pour Pierre c’était qu’il passait ainsi plus facilement inaperçu mais l’inconvénient allait être pour Alex.
Bah ! Après tout, c’était son plan. A elle d’en assumer les conséquences.

En attendant, pour tromper l’ennui, il matait.
Il y avait quand-même quelques petits lots bien sympathiques et peu vêtus à se mettre sous la paupière… en attendant de se les mettre sous la dent.

Comme cette femme accoudée au comptoir.
Plutôt grande, cheveux très blonds coupés courts et ébouriffés avec art , elle se contentait de regarder ses congénères qui se dandinaient sur la piste sans paraître se douter qu’elle était aussi la cible de nombreuses paires d’yeux appréciateurs dont quelques propriétaires n’allaient sans doute pas tarder à passer à l’abordage.
En même temps, c’était compréhensible. Pierre lui-même ne boudait pas son plaisir et laissait courir son regard sur la longue paire de jambe dévoilée par une robe minimaliste. Il enviait les autres hommes assis au bar qui devaient avoir un bien meilleur point de vue que lui sur les cuisses le la mignonne.
Assise en équilibre précaire sur un tabouret haut, ses pieds chaussés d’escarpins aux talons vertigineux battaient distraitement la mesure.
Sa robe était déroutante et attirait l’œil à elle seule : Constituée d’un savant treillis de lamelles métalliques aux reflets moirés, elle semblait vouloir à tout instant dévoiler ce qu’elle cachait mais dés que le regard se focalisait dessus, la vision s’échappait si bien qu’on ne pouvait définitivement dire si elle était nue dessous… mais sans pouvoir non-plus affirmer le contraire.

C’était certain, cette nana allait avoir un franc succès !
Par moment, il lui semblait la reconnaître… Comme s’il l’avait déjà croisée quelque part… Mais il est toujours difficile de resituer une personne lorsqu’on la rencontre hors contexte. Et là, évidemment, le contexte était particulier !

Mais lorsqu’il croisa son regard bleu acier, son cœur fit un bond.
Il se rapprocha rapidement et s’assit à côté d’elle :
« – Alex ! C’est toi ? »
« – Désolée, beau brun, tu dois te tromper : Moi c’est Ophélia. »
« – Arrête ton char ! Wouah ! Dis donc, quelle métamorphose ! Je ne t’avais pas reconnue ! »
« – Ouais, j’ai bien remarqué. Mais si t’avais passé moins de temps à me reluquer les cuisses, tu m’aurais capté plus vite… Quant à toi, moi par contre, je n’ai eu aucun mal à te repérer ! Je te rappelle qu’on avait dit qu’on changeait de look pour éviter de se faire trop repérer. »
« – Ben quoi ? Qu’est-ce qu’il a mon look ? »
« – Tu sens le flic à vingt mètres ! »
« – Arrête de déconner. C’est pas à ce point, quand même ! »
« – J’t’assure. T’aurais au moins pu changer de coiffure. »
« – Tu crois que ça va m’empêcher de conclure ? »
« – Hé ! Souviens-toi : C’est mon plan, plus le tiens ! Pas question de passer son temps à fricoter dans les backgrounds, cette fois. C’est un travail de longue haleine : Je viens ici régulièrement de manière à gagner la confiance des habitués et toi, t’es là pour me couvrir au cas où.
Et si t’arrivais à repérer des professionnelles, ce serait pas mal non plus. »
« – Rien n’empêche de lier l’utile à l’agréable… »
« – Ouais, on a vu ce que ça a donné la dernière fois de lier l’utile à l’agréable… très productif ! »
« – Peut-être pas très productif mais très agréable, en tout cas. »
« – Tu m’étonnes ! »
« – Arrête de faire celle qui regrette. Je sais pertinemment que t’as pris ton pied… et pas qu’une fois ! »
« – Parce que tu crois que le fait d’avoir pris mon pied m’exonère de toute culpabilité, toi ? T’as oublié que je suis en couple. Et quand on est en couple, ce genre de chose ne se fait pas. »
« – Ca y est ! La bonne vieille morale judéo-chrétienne fait encore des ravages ! »
« – Il ne s’agit pas de ça. Il s’agit juste d’intégrité et de franchise. »
« – Ok ok… Et tu comptes faire comment, là ? Avec tous ces échauffés du slip qui lorgnent sur ton petit cul pour deviner si t’as mis une culotte sous ta robe ? »
« – Ca, c’est mon problème… Et pour commencer, tu vas gentiment me poser la main sur la cuisse, là, comme ça. »
« – Hein ? Tu ne sais pas ce que tu veux, toi. »
« – Vas-y remonte lentement sous ma robe. »
« – J’comprends pas. »
« – Ben quoi. Tu ne veux pas savoir, toi, si j’ai une culotte en dessous ? » Fit-elle avec un sourire ironique.
Mais avant que les doigts de Pierre n’arrivent trop loin, elle lui reprit le bras pour le replacer sur ses jambes à lui.
« – Tu joues à quel jeu, là ? »
« – Tu ne croyais quand-même pas que ça allait être aussi facile ! »

Ils restèrent quelques instants à se regarder. Pierre était intrigué par l’attitude de sa partenaire.

« – Vas-y. Recommence. »
« – Quoi ? »
« – Remets ta main sur ma cuisse. »
« – Ok… Tu m’expliqueras ? »
« – Promis… Vas-y avance… Encore… n’hésite pas… »

Cette fois, il sentit le bout de ses doigts toucher un tissu fin avant qu’elle ne le repousse à nouveau d’une main ferme.

« – Mais bon sang ! C’est quoi ton problème ? »
« – Alors ? As-tu senti si j’avais une culotte ? »
« – Oui, il m’a semblé… »
« – Semblé seulement ? Recommence alors… Pour vérifier. »
« – T’es une grande malade, toi, tu sais. »

Cette fois, il en eut la certitude. Elle lui laissa même tâter son entrejambe deux secondes avant de lui balancer une claque retentissante.

Stupéfait, Pierre n’eut d’autre réaction que de se tenir la joue et de lui jeter un regard empli d’incompréhension.

« – Je peux faire quelque chose pour vous Mademoiselle ? » Demanda le barman en regardant Pierre d’un air suspicieux.
« – Non-non ! Tout va très bien. J’ai juste légèrement recadré ce monsieur un peu trop pressant. »
« – Si le monsieur ne sait pas se tenir, il va devoir aller prendre l’air dehors… c’est bien compris ? » Repris le pitbull sur un ton menaçant.

Pierre se contenta d’opiner de la tête. Encore sous le choc.

Alexandra se pencha à son oreille :
« – Parce que t’en méritais bien une deuxième et parce que maintenant, les gros voyeurs lourdingues aux alentours vont y repenser à deux fois avant de venir m’importuner : La « demoiselle » pique et elle a la main leste… L’idéal maintenant, ce serait que tu t’éloignes avec un air vexé… Allez, sans rancune ! »

Pierre n’eut pas à se forcer pour avoir l’air vexé. La petite garce l’avait utilisé comme le premier des bleus !
Il regagna sa place en évitant les regards moqueurs de ses congénères.

Quelques jours plus tard…

Alexandra buvait distraitement sa consommation tout en jetant un coup d’œil circulaire.
Pas grand-chose d’intéressant pour l’instant.
Elle savait d’expérience qu’il faudrait encore attendre une petite heure avant que la boite se remplisse vraiment.
Elle en était à sa troisième soirée en solo et commençait à connaître les us et coutumes de ce petit microcosme : D’abord les couples qui arrivaient après un bon petit repas au resto, puis les hommes seuls qui se réservaient leur point du vue favori, puis enfin les vrais fêtards qui ne se pointaient qu’après minuit passé.
Chaque groupe avait ses codes, ses attitudes.
On repérait assez facilement les petits nouveaux intimidés et empruntés, n’osant faire les premiers pas. Les faux couples qui, une fois passé la caisse et payé un tarif avantageux, se séparaient et vivaient leur vie chacun de leur côté. Les morts de faim, principalement hommes seuls, qui compensaient par le nombre de tentatives leur taux hallucinant de râteaux. Certains étaient assez subtils mais c’était des exceptions. Alex était bien placée pour le savoir. La plupart ne s’embarrassaient d’aucune fioriture pour vous proposer la botte : Les femmes présentes étaient sensées être là pour le sexe alors c’était clair et rapide : Je te plais, on baise, j’te plais pas, c’est pas grave, je passe à la suivante. Ils en oubliaient presque ce qui faisait l’essence même du désir : Le jeu de séduction.

Alexandra se demandait si elle allait enfin progresser.
Les deux premières soirées n’avaient guère été très probantes.
C’était vrai qu’en jouant la beauté froide, elle avait évité toutes les situations scabreuses mais elle avait aussi éloigné toute possibilité de nouer des liens avec des habitués.
Or elle savait que se serait en s’intégrant qu’elle finirait par apprendre des choses.
Mais pour s’intégrer, il fallait jouer le jeu.
Et jouer le jeu signifiait s’adonner à des pratiques qu’elle ne voulait plus réitérer depuis la première expérience avec Pierre.
Et ce pour deux raisons :
La première était Yannick.
Son compagnon ne savait rien de ses activités nocturnes et il fallait que cela reste ainsi. Jamais il n’accepterait qu’elle doive donner ainsi de sa personne pour mener à bien une mission. Et elle le comprenait parfaitement. Elle ne voulait pas lui mentir.
La seconde et pas la moindre était que ce qu’elle avait vécu en compagnie de Pierre, Fred et Jenny lui avait plu… lui avait terriblement plu !
Pour l’instant, elle pouvait encore se persuader que ce n’était qu’un moment d’égarement mais elle sentait au plus profond d’elle-même que si elle récidivait, elle aurait le plus grand mal du monde à s’arrêter. Et alors, il lui faudrait accorder sa conscience avec la réalité… ce qui signifierait la fin de son couple.
Cruel dilemme !

L’arrivée de Pierre dans son champ de vision la distraya un temps de ses pensées contradictoires.
Depuis la première soirée, ils s’étaient entendus pour qu’il ne l’aborde plus du tout. De toute façon, avec le petit coup fourré qu’elle lui avait tendu la première fois, il n’allait pas s’y risquer de sitôt.
Ca l’amusait de jouer le chaud et le froid avec lui. Elle savait qu’il n’appréciait que modérément mais ça avait le mérite de marquer une certaine distance et de lui faire comprendre que ce qui c’était passé dans sa voiture au soir de leur première sortie était, là pour de bon, un véritable moment d’égarement et qu’il n’était pas question de remettre ça, ni dans un club, ni nulle part ailleurs.
Elle se doutait bien qu’il le regrettait et qu’il aurait bien aimé approfondir cette relation mais elle ne s’en sentait pas capable même si elle avait eu, un temps, le béguin pour lui.
Jouer au chat et à la souris avec son chef n’était donc pas très sympa pour celui-ci mais il ne pouvait pas vraiment s’en plaindre : Après tout, il avait eu droit à une compensation tout à fait honorable.

« – S’il y en a une que je ne m’attendais pas à trouver ici, c’est bien vous, lieutenant Verneuil ! »
Alexandra sursauta. Elle n’avait pas entendu le propriétaire de cette voix grave et sensuelle s’approcher dans son dos.
« – Monsieur Lebris ! Vous m’avez fait peur ! »
« – Telle n’était pas mon intension… Vous êtes ici pour le boulot ou pour le plaisir ? »
« – C’est uniquement professionnel, rassurez-vous ! » précisa-t-elle de façon un peu trop précipitée.
« – Vous n’avez nul besoin de me rassurer, je vous en prie… Je dirais même plutôt que j’éprouve une pointe de déception… »
« – Ah oui ? Et pourquoi donc ? »
« – Et bien avec une telle tenue, une robe si courte, un décolleté si… décolleté, j’eus préféré vous voir là pour le plaisir des sens car alors j’aurais mis un point d’honneur à vous inviter sur la piste de danse dans un premier temps et, qui sait, vers des terres inconnues… dans un deuxième temps… » Susurra-t-il en la déshabillant du regard.
Alex se surprit à avoir soudain très chaud. Elle devait être rouge comme une pivoine.
En quelques mots savamment distillés, appuyés par un regard de braise, l’homme avait fait montre d’un savoir faire admirablement rodé en terme de séduction.
Alex en était toute chose mais elle s’en voulait aussi de réagir comme la plus naïve des midinettes lors de son premier rendez-vous galant.
Elle tenta de rétablir la situation :
« – Vous me voyez désolée de vous décevoir, monsieur Lebris. »
« – Si vous m’appelez Xavier, vous serez en partie pardonnée. Et si vous acceptez un verre, vous le serez totalement. » Répondit-il en faisant un signe au barman sans attendre l’assentiment de la jeune femme.

« – Mais cela n’enlève rien à mon étonnement de vous voir ici, vous et votre chaperon… » Réattaqua-t-il en désignant Pierre qui faisait semblant de les ignorer à quelques mètres de là. « … je croyais l’enquête terminée et clôturée. »
« – Vous voilà particulièrement bien renseigné pour un simple témoin, Xavier ! C’est à votre tour de m’étonner. »
« – Oh vous savez, je n’ai pas de mérite : Comme je vous le disais lors de notre dernière rencontre, ce milieu est un petit monde où les nouvelles vont très vite. Vous imaginez bien que le gérant de l’Exotix a vite relayé l’information comme quoi Julia était décédée de mort naturelle. Il en allait de la réputation de son club et de sa survie financière, tout simplement. »
« – Je vois… Les nouvelles vont vite, en effet. »
« – Et voilà donc pourquoi je me permets d’insister : Si ce n’est ni pour Julia ni pour la bagatelle, que faites vous donc dans ce temple du stupre et de la luxure ? »

Alex se demanda si elle pouvait lui dire la vérité mais après un bref moment de réflexion, elle se décida. Ce type lui inspirait confiance et après tout, peut-être allait-il pouvoir l’aider à avancer dans son enquête.
« – En fait, c’est à cause de vous. »
« – De moi ? » S’étonna-t-il avec un mouvement de recul.
Elle sourit, satisfaite de son petit effet.
« – Ben oui : Lors de notre dernière rencontre, vous avez clairement sous entendu que des professionnelles travaillaient dans ce genre d’établissement. Alors nous venons vérifier vos soupçons et éventuellement contrôler la présence d’activité de prostitution active, voire de proxénétisme. »
« – Ah ça ! » fit-il visiblement soulagé « Bien-sûr ! Comment n’y ai-je pas pensé ! »
« – Et oui. Voyez-vous, nous sommes à l’affut de la moindre information et les vôtres étaient de premier choix. Alors nous fouinons… Vous savez que c’est notre spécialité. »
« – Ok – Ok ! Et alors. Vous trouvez ? »
« – Et bien, pour tout vous dire, pour l’instant, c’est plutôt maigre… voire famélique… Et en vous voyant là, je me suis justement dis que vous pourriez peut-être m’aider un peu… »
« – Ah écoutez, rien ne me ferait plus plaisir ! Prêter main forte à la police et de surcroit à une si jolie policière, je ne vois pas comment je pourrais refuser ! »
« – Vil flatteur ! »
« – Que nenni ! D’ailleurs, je suis certain que les multiples regards appréciateurs qui s’égarent sur vos courbes depuis votre entrée ici vous ont depuis longtemps rassurée sur votre pouvoir de séduction, non ? »
Alex s’empourpra de nouveau. Xavier était un redoutable charmeur. Ses mots touchaient toujours juste et elle sentait son corps réagir aux bienfaisantes ondes de la voix grave… Elle dégoulinait !
Heureusement, ignorant peut-être l’état dans lequel il la mettait, celui-ci recadra de lui-même la discussion :
« – Alors, en quoi vais-je bien pouvoir vous être utile ? »

Le morceau s’éternisait mais Alexandra n’en avait cure.
Le moins qu’elle pouvait dire c’était que son partenaire était bon danseur. Très bon même !
Elle savait qu’elle n’était pas objective mais elle s’en foutait. Sous ses mains, elle sentait la musculature jouer comme une machinerie efficace et parfaitement huilée.
Les mouvements synchrones libéraient un parfum musqué mais discret, délicat et sensuel.
C’était bon de se sentir emportée par la musique dans les bras d’un homme doué.
C’était bon de se sentir désirée.
Car sur ce point, le doute n’était plus permis. Après le rentre-dedans distingué mais indéniable qu’il lui avait fait au bar, elle pouvait maintenant physiquement sentir l’envie qui étreignait l’homme à chaque fois que son ventre ou ses hanches se frottaient d’un peu trop près au relief qui ornait son pantalon.
Ca l’amusait.
Ca l’excitait aussi. Comme si elle avait besoin de ça !

Lorsqu’elle lui avait exposé son plan, il avait dit oui tout de suite.
Pourtant, ce n’était pas réellement un plan, à peine une ébauche de stratégie improvisée au fur et à mesure qu’elle lui venait à l’esprit.

L’idée était simple : Fort de son expérience et de ses habitudes dans le club, Xavier devait lui indiquer les filles qu’il soupçonnait venir ici pour des raisons « professionnelles » et, dans la mesure du possible, faciliter le contact entre l’une d’entre elles et Alexandra.

Pour la première partie, ce ne fut pas difficile. Il lui désigna deux très belles jeunes femmes.
La première était en grande discussion avec type bedonnant autour d’une bouteille de champagne, la seconde était seule au bar, semblant attendre l’opportunité, « tout comme vous, d’ailleurs. » ne manqua-t-il pas de relever.
« – Vous voulez dire que j’ai l’air d’une pute ?! »
« – Loin de moi cette idée !! » S’était-il récrié. « Mais admettez que pour celui qui ne sait pas, il est difficile, dans un lieu pareil, de faire la différence entre une professionnelle qui attend le client et une femme libérée qui cherche l’aventure. »
« – Bref, si je comprends bien, j’ai le choix entre avoir l’air d’une pute ou d’une nympho ! »
« – Oh misère ! Je sens que je m’enfonce, là… disons que je n’ai rien dis. »

Pour la seconde partie du plan, c’était un peu plus compliqué et il demanda juste de lui faire confiance…
Classiquement, son complice avait proposé de commencer par faire semblant d’être un vrai couple.
Si, sur le coup, Alexandra avait été un peu déçue par le relatif manque d’originalité dont il avait fait preuve pour trouver un bon prétexte afin de l’emmener danser et la tenir tout contre lui, Alexandra ne pouvait non plus nier qu’elle en mourrait aussi d’envie.
Et depuis qu’ils jouaient à frotti-frotta, il lui aurait tout aussi été difficile de ne pas admettre qu’elle y prenait un réel plaisir… surtout quand les lèvres de l’homme exhalaient leur souffle chaud sur sa nuque et ses épaule…
Et si sa tête essayait tant bien que mal de garder un semblant de maîtrise, que dire de son corps qui se liquéfiait sous les caresses de plus en plus précises de son cavalier !

Lorsqu’elle avait accepté sa stratégie de vrai faux couple, elle lui avait aussitôt mis les points sur les i en lui précisant qu’elle était mariée et qu’il était hors de question qu’il y ait une quelconque relation charnelle entre eux.
Mais maintenant, elle voyait bien que pour celui-ci, la « mission » était passée au second plan… voire au troisième !
Et elle-même se sentait toute proche d’envoyer valser ses principes et de se laisser entrainer vers les coins obscurs dès qu’il lui en ferait la proposition… ce qui, selon ses estimations, n’allait pas tarder…

Toutefois, il la surprit une nouvelle fois :
A la fin du morceau de musique, alors qu’elle se demandait comment repousser ses avances de manière crédible tandis que tout son corps suintait le désir sexuel, il la prit par la main, non pas pour l’emmener vers le trompe l’œil qui masquait l’entrée des « coins câlins » mais pour retourner à leur point de départ : le bar.
« – Installez-vous là, je reviens dans une poignée de secondes. »
Interloquée, Alex le laissa partir en pensant qu’il avait sûrement un besoin urgent à satisfaire.

Mais il ne se dirigea pas vers les toilettes.

Il traça droit vers celle qu’il soupçonnait d’être une professionnelle, la femme seule qui attendait à l’autre bout du bar.
Il parlementa quelques instants avec elle, et Alex le vit la montrer du doigt à deux reprises.
Qu’est-ce qu’il pouvait bien lui raconter ?
Elle lui avait demandé son aide, certes, mais elle ne goûtait que très modérément ce genre d’initiative non planifiée.
Surtout qu’elle ne le connaissait pas plus que ça, finalement.
Si cela se trouvait, il allait tout faire foirer avec ses gros sabots !

Un coup d’œil vers Pierre lui confirma que lui aussi se demandait ce qu’il se passait. D’autant que lui n’était même pas au courant de l’offre d’aide de Lebris.

Lorsqu’elle les vit revenir tous les deux, des fourmillements d’excitation lui parcoururent le ventre.
On entrait enfin dans le vif du sujet !

« – Voici donc Alexandra, ma compagne et Alexandra, je te présente Olivia… »
Par devers elle, Alex éprouva un sentiment d’amusement : Heureusement que la jeune femme n’avais pas choisi Ophélia comme pseudo sinon, elle aurait éclaté de rire… pour la plus grande incompréhension des deux autres.
Xavier Lebris commanda une bouteille de champagne pour eux trois et continua les présentations :
« – Comme je l’expliquais donc à Olivia, en la voyant toute seule assise là-bas, on s’est dit que se serait sympa si elle acceptait de prendre un verre avec nous, histoire de faire connaissance et qui sait, si ça la tentait, de continuer avec nous dans les coins câlins… depuis le temps que l’on rêve de faire un trio HFF, hein chérie ! » Fit-il en lui enserrant amoureusement les épaules.
Alex sursauta.
Ce n’était pas tant le geste d’affection qui la surprenait. Après tout, c’était naturel dans un couple.
Non, ce qui l’avait étonnée, c’était la proposition de Lebris.
Ainsi, c’était ça son plan tellement génial qu’il ne lui en avait même pas parlé au préalable.
Mouais, finalement, il n’était guère plus futé que Pierre, le Xavier : Une histoire de vrai faux couple, de la danse collé-serré pour faire monter la chantilly et hop, dès que c’était possible, trouver un prétexte pour qu’elle se laisse culbuter dans les backgrounds.
Décevant.
Mais au moins, lui, il avait le mérite de faire ça en toute franchise, sans faux semblant.
Après tout, si ça ne lui convenait pas, elle n’était pas obligée d’accepter… il faudrait juste être crédible et cohérente vis-à-vis de la supposée prostituée.

D’ailleurs, en parlant de cohérence et de crédibilité, celle-ci était justement en train de mettre le doigt sur un point d’achoppement de leur stratégie :
« – Je n’aurais jamais cru que vous étiez un vrai couple, tous les deux : Toi Xavier, ça un bout de temps que je te vois ici et toi Alexandra, ça ne fait que deux ou trois fois mais jamais je ne vous avais vu ensemble, bizarre, non ? »
Surprise par la perspicacité de la jeune femme, Alex laissa Xavier se débrouiller avec sa « stratégie ».
Celui-ci s’en sortit d’ailleurs avec brio…
Affectant un demi-sourire de contrition, il admit :
« – Ok, Alexandra et moi on n’est pas vraiment un couple mais plus des sex friends… Ca ne fait pas très longtemps que l’on est ensemble et je ne lui ai parlé que très récemment de mes visites ici… Curieuse, elle est venue d’abord seule, juste pour voir… et aujourd’hui, nous étions libres au même moment, c’est pourquoi nous voilà ensemble. »
« – Ah ok, je vois… et j’imagine que vous êtes maqués chacun de votre côté mais que vos conjoints ne savent pas que vous êtes là. »
« – Exactement ! » approuva Alex. La concernant, la fille ne pouvait pas avoir vu plus juste !

Vidant doucement mais sûrement les 75 centilitres de vin pétillant, le trio avait continué à faire connaissance, la conversation tournant principalement autour du sexe et des expériences que le soi-disant « couple » avait eu ou envisageait expérimenter.

Lorsqu’Olivia s’absenta pour se « repoudrer le nez », Alex ne tarda pas pour recadrer son complice :
« – Ainsi, c’était ça votre brillant plan… »
« – Oui, pas mal non ? Vous vouliez être mise en relation avec une prostituée… Quoi de mieux pour faire connaissance qu’une petite partie de jambes en l’air ? »
« – Sauf que je vous avais prévenu que je n’ai aucunement l’intention de faire quoi que ce soit dans ce registre. »
« – C’est un trio HFF que je propose : un homme et deux femmes. Selon toutes probabilités, il y a fort à parier que ce sera moi qui serai mis à contribution, si vous voyez ce que je veux dire, ne vous en faites donc pas ! »
« – Je vois parfaitement ce que vous voulez dire mais qui dit triangle dit trois côtés et je ne vois pas comment je pourrai ne pas être mise à contribution comme vous dites si bien ! »
« – Bah, rien ne vous oblige à faire quoi que ce soit… et si vous tenez vraiment à ne pas avoir de relation charnelle avec moi, vous pourrez toujours donner le change avec Olivia… cela conviendra peut-être mieux à votre conscience de femme mariée… » Répondit-il avec un sourire provocateur.
« – Des relations entre femmes vous voulez dire ? »
« – C’est bien ça oui. Ne me dites pas que vous n’avez jamais goûté aux plaisirs saphiques ! »
Alex se sentit rougir lorsque le souvenir de ses troublants élans avec la belle Jenny lui revinrent en mémoire.
« – Je n’ai pas dit ça… »
« – Ben alors… vous voyez ! »

Pour éviter toute demande de précision intempestive, Alex contrattaqua :
« – Et d’abord, comment l’avez-vous appâtée, Olivia ? »
« – Facile ! Je l’ai appâtée comme on appâte ce genre de gibier, ma chère : Avec de l’argent ! »
« – Ah ! Donc c’en est bien une ! »
« – Ah oui ! Sans équivoque ! Son tarif était clair et net : Une bouteille de champ’ pour la boite et deux billets pour elle. »
« – Et vous l’avez payée ? »
« – Oui, discrètement… Mais ça, la sex friend que vous êtes n’est pas sensée le savoir, ok ? Pour elle, je suis un homme passablement porté sur la chose qui a tellement envie de se faire un plan à trois avec sa copine qu’il est près à payer pour ça. »
« – Ok, ça marche… Par contre, le fait qu’elle se fasse payer directement ne plaide pas vraiment en la faveur d’un proxénétisme flagrant et organisé, ici. A moins qu’elle ne rétrocède une partie de ses gains au patron de la boite, il sera difficile d’inculper celui-ci juste pour des incitations à la consommation. »
« – Ah ça, c’est votre partie, plus la mienne. Et puis de toute façon, je me suis dit qu’une fois notre petit trio terminé, j’offrirai une seconde bouteille que je vous laisserai boire en tête à tête… Avec tout ça, elle devrait être assez encline à la confidence et ça vous permettra sans doute d’en savoir beaucoup plus. »
« – Dites donc ! Vous avez pensé à tout, vous, félicitations ! Et merci aussi, c’est très généreux de votre part. Mais qu’est ce qui vous dit qu’elle acceptera tout ça ? »
« – Rappelez-vous que c’est une professionnelle et une pro accepte tout du moment qu’on y met le prix… D’ailleurs rien n’est laissé au hasard, vous savez. Par exemple, son départ pour se repoudrer le nez n’était pas innocent : Il est sensé nous laisser du temps pour que vous décidiez si vous êtes finalement partante ou pas pour aller plus loin… ou éventuellement me donner le temps de vous convaincre… A partir de là, si c’est oui, ça va aller très vite, vous allez voir… »
« – Ah oui, en effet, c’est bien rodé ! » Admit Alex en voyant la grande brune revenir vers eux…

Pour ce qui était de voir, Alex put voir !

A peine revenue, Olivia ignora la bouteille au tiers pleine et demanda :
« – Alors, ce petit baptême en trio, ça vous tente toujours ? »

Il ne fut pas difficile de trouver une alcôve libre.
Il ne fut pas non plus compliqué de déshabiller la jolie Olivia. La tenue minimale ne résista pas longtemps aux mains expertes de Xavier qui jouait parfaitement le rôle du mec pressé de passer aux choses sérieuses…
Alex resta prudemment en retrait, au début. Mais Olivia qui avait bien compris les attentes du couple s’attaqua elle-même à la robe de l’élégante fausse blonde.
Pour continuer à donner le change, celle-ci fut bien obligée de se laisser faire et nota avec une pointe d’agacement amusé le regard de Xavier qui, dans le dos de la jeune prostituée, semblait lui dire : « Ben oui, faut bien en passer par là ! ».
Elle se doutait bien que l’homme ne boudait pas le plaisir de la voir mise à nue par l’autre femme et lorsque sa mini robe glissa à ses pieds, elle remarqua une étincelle de désir dans les yeux du mâle que son sourire en coin ne démentait pas.
Et alors que ses mains courraient sur le corps d’Olivia, c’était bien elle qu’il admirait, qu’il cajolait du regard… C’était les seins de la prostituée qu’il avait dans les paumes mais il ne faisait aucun doute que c’était ceux d’Alex qu’il rêvait d’avoir à leur place.
Avait-il conscience du feu qu’il avait allumé en elle ?
Se doutait-il que son ventre brulait, que son sexe coulait ?
Savait-il que son corps mourrait d’envie d’être à la place d’Olivia sous ses caresses ? Qu’une part de plus en plus infime de son esprit résistait encore ?

Peut-être… ou peut-être pas.
La jeune professionnelle ne lui laissa de toute façon pas le temps de se poser plus de question.
Ignorante du jeu du chat et de la souris qui animait ce couple hors norme, elle avait repris l’initiative : L’homme du trio ne resta pas longtemps le seul habillé… Elle s’attaqua à sa chemise, ses chaussures, son pantalon… et, avec une lenteur toute calculée, elle fit descendre le caleçon le long des cuisses finement musclées…
Lorsqu’elle découvrit les mensurations particulièrement avantageuses de la colonne de chair palpitante qui lui sauta au visage, elle ne put réprimer un sifflement admiratif.
Elle se tourna vers Alex :
« – Ben ma belle, avec ça, tu ne dois pas t’ennuyer tous les jours ! »

La belle en question ne répondit pas. A posteriori, elle espéra même ne pas avoir trop montré son propre étonnement devant ce phallus imposant, devant ce braquemart au gland violacé.
Mais si ce fut le cas, Olivia ne sembla pas le remarquer. D’ailleurs elle n’avait plus d’yeux que pour le membre viril qui attendait son hommage buccal.
Et elle ne se fit pas prier.
Sa bouche pulpeuse goba le bout tendu sous le regard envieux de la compagne d’apparat.

Xavier se tenait debout, jambes écartées. Agenouillée devant lui, la tête de la jeune suceuse allait et venait au niveau de son entrejambe…
Alex n’osait plus regarder le visage de l’homme. Elle avait peur d’y voir se sourire enjôleur qu’elle commençait à bien connaître, ce sourire qui la faisait craquer, ce sourire qui lui donnerait envie de remplacer celle qui officiait sur sa hampe.
Elle savait qu’elle était au bord de la rupture, sur le point de craquer…

Comme un fait exprès, ce fut le moment que choisit Olivia pour l’interpeller :
« – Hé, il parait que c’est un trio ! T’as le droit de venir m’aider, tu sais, on ne sera pas trop de deux sur le morceau ! »

Elle ne chercha pas à s’esquiver… pas l’ombre d’une excuse…

Elle s’approcha timidement à côté de la professionnelle et lorsque celle-ci lui tendit le gland luisant, elle ouvrit simplement la bouche…
Xavier grogna de contentement.

L’objet était déjà gros à voir mais dans la bouche c’était encore pire !
L’impression d’avoir un énorme champignon doux et dur à la fois qui occupait tout l’espace disponible sous son palais. Une invasion qui s’enfonçait dans sa gorge alors que la main de Xavier se posait sur ses cheveux pour imprimer un rythme de lent va et vient.
Alex dut faire marche arrière, de peur d’avoir un malencontreux réflexe nauséeux. Olivia en profita pour reprendre son bien mais resta partageuse…
A partir de ce moment, les deux femmes unirent leurs efforts pour satisfaire la hampe fière et roide tendue entre elles…
Les lèvres et les langues courraient tout le long de la tige droite, embrassant, léchant et suçant avidement sous les soupirs d’approbation du mâle pleinement satisfait…
Parfois, elles se rencontraient, se touchaient et s’embrassaient sans aucune gêne, oubliant un bref instant la virilité tentatrice.
Alex sentait toujours la main droite de Xavier dans ses cheveux. Sans doute avait-il la gauche dans ceux d’Olivia.
En tout cas, il était aux anges. Il grondait, ronronnait et la pression de ses mains variait à mesure que les caresses sur sa queue se précisaient.

Parallèlement, Alex sentait d’autres mains, plus fines, plus délicates se poser sur elle… Olivia la câlinait doucement et éveillait en elle de délicieuses sensations, semblables à celles qu’elle avait découvertes dans les bras de la tendre Jenny.
Elle-même se laissa aller à poser ses main sur le corps accroupi à côté d’elle… Du bout des doigts, elle retrouva la douceur indescriptible de la courbe d’un sein… d’un téton fièrement dardé, d’une gorge frémissante…
Olivia était, elle, plus expérimentée, plus directe.
Alex sentit sa petite main venir s’insinuer entre ses cuisses… Un doigt inquisiteur vint lui effleurer le clitoris… Elle tressaillit et eut peur d’avoir mordu Xavier par simple mouvement réflexe.
Mais celui-là ne s’en plaignit pas. Bien au contraire !
Ses mouvements de bassin s’étaient encore accentués alors qu’Olivia l’avait repris en bouche.
Alex se demandait comment la jeune femme pouvait faire pour en avaler autant sans protester.
Certes, elle était sans doute très habituée mais là, c’était un morceau de taille !

En tout cas, elle devait faire montre de toute sa science car l’homme se crispait de plus en plus fréquemment. Alex crut même que le point de non retour avait été atteint mais c’était sans compter avec la remarquable maîtrise dont Xavier faisait preuve.
Grondant et soufflant, il s’arracha à la « ventouse Olivia » et lui susurra à l’oreille :
« – Ne nous emballons pas, ma belle, j’ai d’autres envies ! »
Sans ménagement, il la souleva et la bascula sur le sofa derrière elle… Comme par magie, Alex le vit sortir un étui de préservatif et il enfila celui-ci avec une rapidité dénotant une habitude certaine.

Olivia émit un long feulement rauque lorsque l’énorme pieu s’enfonça en elle.
Ses bras se refermèrent sur les épaules de son partenaire tandis que ses cuisses s’ouvraient au maximum pour laisser passer l’imposante invasion.
Son premier cri de plaisir déchira le silence feutré de leur petit recoin.
Alex sentit une boule lui tirailler les entrailles.
Même si elle savait que les prostituées sur-jouaient le plaisir en général, au fond d’elle-même, elle se doutait qu’Olivia, cette fois, ne simulait pas.
Etonnamment, elle se surprit à ressentir de la jalousie envers la jeune femme brune.
Même si elle jouait un rôle, même si elle était mariée à un autre, elle aurait voulu être à la place de la prostituée.
Ca aurait dû être elle qui aurait dû accueillir les coups de boutoir de Xavier ! C’est pour elle qu’il aurait dû grogner et gémir, enfoncé au plus profond de son intimité ! Il n’avait pas besoin de payer pour ça !

Mais peu à peu, la jalousie primaire laissa place à un sentiment plus mitigé, mélange de fascination et d’excitation… regarder ce couple copuler sauvagement devant elle faisait revenir de troublants fourmillements au creux de son ventre…

Les cris de plus en plus aigus d’Olivia avaient fini par attirer quelques curieux qui s’approchèrent devant l’alcôve… un ou deux couples mais surtout des hommes seuls… simples voyeurs qui se tiraient plus ou moins discrètement sur la nouille mais aussi des plus entreprenants qui, voyant une belle femme seule occupée à regarder les ébats du couple, se dirent qu’il y avait peut-être là une sacrée bonne occasion d’en profiter.
Lorsqu’elle sentit quelques mains audacieuses s’aventurer sur sa croupe, Alex eut tôt fait de les renvoyer dans leurs 22 à l’aide d’un regard peu amène qu’un assassin n’aurait pas renié.
Le message était clair et elle ne fut plus importunée.

Olivia criait maintenant en continu.
Xavier semblait particulièrement s’appliquer.
De temps en temps, il glissait un coup d’œil vers Alex.
Celle-ci lisait dans son regard mutin un message limpide : « Regarde, ma belle, ce que tu as refusé, ce que tu aurais pu avoir si tu n’avais pas été si coincée ! Imagine-toi à la place de cette petite pute ! »
Et Alex n’avait pas à faire beaucoup d’effort pour s’imaginer remplie par ce sexe, labourée par ce fabuleux piston !

Semblant comprendre sa frustration, Xavier se retira soudain et glissa un mot à l’oreille d’Olivia.
Celle-ci acquiesça, se lova vers Alex et bascula sur celle-ci, lui octroyant le baiser le plus passionné qui lui ait été donné de recevoir d’une femme.
Totalement passive, elle se laissa faire, elle se laissa embrasser la bouche, le cou, la gorge…
Lorsque la petite tête atteignit sa poitrine, elle gémit en sentant ses pointes de seins sucées jusqu’à la limite du supportable.
Et la chevelure brune descendit encore…
Alex laissa échapper un râle de plaisir lorsqu’elle sentit une langue agile s’insérer entre ses replis intimes… Une sensation inédite, si douce, si tendre, sans barbe rêche ni menton râpeux… Une petite langue chaude qui semblait connaître le moindre de ses désirs, le plus petit point à titiller pour déclencher des ondes de divin plaisir…
Alex se sentit décoller. Les premières contractions symptomatiques embrasèrent son bas ventre…
Elle explosa lorsque la bouche sur son sexe vrombit elle aussi de plaisir.
Ses ardeurs nullement ramollies devant le magnifique tableau d’une femme donnant du plaisir à une autre, Xavier n’avait pu se retenir…
Se positionnant derrière la croupe impudiquement relevée de la belle gamahucheuse, il l’avait enfilée d’un seul élan !

Les assauts reprirent. Encore plus puissants, encore plus brutaux !
Olivia dû bientôt se résigner à lâcher les lèvres intimes de sa partenaire sous peine de l’exciser avec les dents !
Chaque coup de boutoir l’envoyait plus loin, la repoussait de quelques centimètres.
Alex vit peu à peu, la petite tête brune refaire le chemin inverse, remonter par à-coup le long de son ventre, de sa poitrine pour aller se loger dans son cou.
Elle serrait fort la jeune femme qui accusait les élans virils, elle sentait les cuisses de l’homme se contracter contre les siennes et, dans cette position, ressentant indirectement les violents coups de reins, elle avait presque l’impression que c’était elle qui subissait les puissants va-et-vient au sein de sa propre matrice.
Si bien qu’elle se surprit à crier de plaisir au moment même où Olivia hurlait dans son oreille et où Xavier grondait un ultime rugissement.

Même si elle aurait préféré se faire tuer plutôt que de l’admettre, Alexandra était un peu frustrée.
Elle aurait aimé que leur trio perdure encore un peu. Elle aurait apprécié que Xavier se montre câlin, voire même entreprenant avec elle et qu’il propose de remettre le couvert avec, cette fois-ci, au menu : Elle !

Mais non, après un bref moment de récupération mutuelle, ils s’étaient rhabillés en silence alors que leur petit coin avait enfin été déserté par les voyeurs, ceux-ci ayant compris qu’il n’y avait plus rien de croustillant à mater et s’en allant voir ailleurs si l’action se renouvelait.

C’est d’ailleurs à ce moment là qu’Alex remarqua quelques trainées gluantes sur sa jambe et réalisa qu’un gros dégueulasse s’était laissé aller sur elle dans le feu de l’action.

« – La rançon de la gloire ! » Avait précisé Xavier avec un demi-sourire.
« – Mouais… j’men serais bien passé ! »

Comme convenu, de retour dans la partie dancing, Xavier Lebris avait commandé une seconde bouteille afin de se garantir la compagnie d’Olivia encore quelques temps et, après avoir bu une coupe, il se leva et posa un bécot surprise sur les lèvres d’Alex :
« – Bon, ma chérie, je te laisse. Tu as ton taxi, n’est-ce pas. »
Surprise, Alex acquiesça
« – Oui oui ! »
Il fit la bise à Olivia et repartit sans se retourner.

Un sentiment de vide s’empara d’Alexandra.
Essayant de se persuader que cela n’était pas dû au départ de son complice, elle se demanda comment aborder le sujet de la prostitution avec la jeune femme.

Mais celle-ci fit une remarque qui allait donner à leur conversation un tour tout à fait inattendu.
« – Il te plante là, comme ça ? »
« – Oui, mais ne t’inquiètes pas, c’était prévu. »
« – C’est marrant, ça me rappelle un autre couple dans le même genre : Ils coquinaient ensemble mais partaient toujours séparément. »
« – Ah bon ? Mais tu parles à l’imparfait : Ils ne viennent plus ? »
« – Bah ça risque pas : Elle s’est fait trucider il y a trois mois de ça… ici même ! Mais tu ne dois pas le savoir, c’était avant que tu arrives. »
« – Ah si ! J’en ai entendu parler, bien évidemment… mais je croyais avoir entendu qu’elle était morte de façon naturelle… pas « trucidée » comme tu dis ».
« – Ca, c’est que les gros bonnets ont voulu faire croire… » Répondit la jeune femme sur un ton mystérieux.
Alex réprima un sourire intérieur. Même lorsque les faits sont avérés, il y aura toujours quelqu’un pour accréditer la théorie du complot.
« – Ah ? Et pour toi, c’est quoi alors ? On l’aurait quoi, droguée ? Suicidée ? »
« – Oh c’est bien plus subtil que ça ! La drogue ça laisse des traces… Non, y a bien plus efficace et bien plus discret… »
« – Alors quoi ? Allez ! Fais pas ta mystérieuse… Accouche ! »
Olivia regarda autour d’elle avant de se pencher vers Alex, accentuant à l’envie son effet théâtral…
« – Dans le milieu, on l’appelle « le Tueur »… »
« – Hein !? Mais qu’est ce que c’est que cette histoire ?! Je croyais qu’il n’y avait ni trace de coup ni trace de blessure ! »
« – Dis-donc, tu m’as l’air bien renseignée toi, tout d’un coup ! »
Alex se mordit les lèvres. Elle en avait trop dit.
« – Non mais c’est ce que j’ai entendu. »
« – Et bien t’as entendu des conneries… Le tueur dont je te parle, il a une technique tout à fait particulière… unique en son genre, même… »
« – C’est-à-dire ? »
Olivia se rapprocha encore de l’oreille de son interlocutrice.
« – On ne va pas se la jouer : T’as compris que ton mec m’a payée pour que je vienne m’amuser avec vous deux, n’est-ce pas ? »
On y était ! Alexandra approuva d’un hochement de tête.
« – Mais quel est le rapport ? »
« – Dans le petit monde de la nuit en général et de la prostitution en particulier, on raconte que quand une fille commence à devenir un peu trop gourmande ou un peu trop rétive, on fait venir ce mec, le Tueur, comme un simple client… En fonction de la faute de la nana, il lui fait comprendre qu’elle n’a pas intérêt à recommencer ses conneries… Et si besoin, il va… jusqu’au bout… D’où son surnom. »
« – Ok mais je ne comprends toujours pas : Il les punit comment, les nanas ? »
« – Mais avec son mandrin, ma chérie ! Tout simplement avec sa queue ! Qu’il utilise sans faiblir… comme une véritable arme de guerre…jusqu’à ce qu’elles aient compris la leçon ou que leur cœur lâche… En d’autres termes : Il les baise à mort ! »

Tout le long du trajet, Alex était restée silencieuse.
Pierre, lui, faisait ostensiblement la gueule.

Pour tout dire, il avait les plus grandes difficultés à réprimer le sentiment de jalousie qui lui étreignait le corps depuis le milieu de la soirée.
C’était bien la peine de lui jouer la grande scène de la femme offusquée !
Tout ça pour se jeter dans les bras de ce bellâtre de Lebris à la première occasion !

Pierre n’avait pas fait partie du premier cercle de voyeurs mais ce qu’il avait pu entrevoir lui avait largement suffit : Alexandra avait tout oublié, à commencer par ses bonnes résolutions…
Ses bonnes résolutions et lui !

Encore avait-elle eu de la chance qu’il ne fasse pas demi-tour immédiatement et ne la plante au beau milieu de ses « nouveaux amis » pour ensuite la laisser rentrer chez elle par ses propres moyens !
Ca lui aurait fait les pieds !

Mais non. Trop bon, trop con, le Pierre.
Il avait attendu sagement que madame daigne lui faire signe qu’il était l’heure de rentrer.

Et tout ça pour ne pas décrocher un mot de tout le voyage !
Franchement, il y avait des claques qui se perdaient !

Mais bon. Puisqu’il fallait lui tirer les vers du nez…

« – Tu as obtenu des infos utiles au moins ? »

Elle était vraiment ailleurs. Elle mit un long moment à répondre.
A tel point que Pierre crut qu’elle s’était finalement endormie.

« – A quel sujet ? »

« – A quel sujet ?!! Mais tu te fous de ma gueule ma parole ! Tu te rappelles au moins pourquoi tu étais dans ce bouge, non ? Mais si, souviens-toi : Une vague histoire de prostitution ! Mais bon, c’est vrai qu’après être passé entre les bras du beau Xavier, tout le reste n’avait plus vraiment d’intérêt, n’est-ce pas ! »

Elle ne releva même pas la provocation. Signe intriguant d’un réel trouble.
Toutefois, elle sembla atterrir un peu :
« – Concernant la prostitution, y a plus de doute. Y en a. Reste à connaître le degré d’implication du patron de la boite : Proxénétisme actif, passif… ou simple échange de bon procédé… On verra bien mais j’ai déjà de quoi le cuisiner un peu. »

« – D’accord… C’est finalement pas si mal… C’est ça qui te met dans un tel état ? »
« – Quel état ? »
« – Ben j’sais pas… T’as l’air de planer à 5000… Ton Lebris t’a chamboulé les neurones à ce point ? Il doit être sacrément doué ! »

Deuxième provoc et deuxième coup d’épée dans l’eau…

« – Non-non. C’est pas ça… Enfin si, c’est vrai qu’il est très attachant mais c’est autre chose… C’est ce que m’a dit Olivia… »

Alors là, si elle admettait d’emblée être troublée par Lebris, sans combattre et sans le moindre faux-semblant c’était qu’il y avait vraiment un truc qui clochait.
A tel point que Pierre commença à s’inquiéter.
« – Olivia, c’est la femme qui était avec vous ? C’est une prostituée, n’est-ce pas ?
« – Oui, c’est ça. »
« – Et que t’a-t-elle donc dit qui te renverse à ce point ? »
« – Un truc… bizarre… mais je préfère me renseigner avant de t’en parler. Si ça se trouve, c’est un pur délire. »
« – Ben OK, fais ta secrète si tu le veux… De toute façon, nous voici arrivés ! Tu m’en diras plus lundi… En attendant, tâche de bien récupérer et fais gaffe à la gaffe : Le gars qui t’attends dans ton pieu, il s’appelle Yannick, pas Xavier ! »

Elle lui renvoya une grimace agacée :
« – Très drôle ! Allez, merci et rentre chez toi pauv’ garçon ! »

Ah ! Voilà qui était déjà mieux !

« – Allo, Xavier ? »
« – Ah ! Alexandra ! Bonjour, comment vas-tu ? Bien dormi ? »
« – Très bien, merci. Je suis désolée de vous déranger un samedi mais j’avais besoin de vous poser une petite question. »
« – Mais pas de problème ! Y a pas de dérangement et je suis toujours disponible pour ma gendarmette préférée ! »
« – Euh, je ne suis pas de la gendarmerie mais de la police… mais ne vous avisez pas non plus de changer gendarmette par fliquette… c’est un conseil d’ami. » Riposta-t-elle, un sourire dans la voix.
« – Ok ! Ok ! Je vois qu’il y a des sujets vachement sensibles dans la police ! » rigola-t-il « Promis, je vais faire gaffe. Par contre, je croyais qu’avec ce que nous avions vécu la nuit dernière, le tutoiement serait définitivement adopté. »
« – Hmm. C’est-à-dire qu’hier nous avons joué un rôle… Aujourd’hui, c’est différent, vous voyez ? »
« – Ok, je vois bien, en effet : Chacun à sa place… J’ai bien pigé. »
Alexandra décela une légère amertume dans la voix de son interlocuteur.
« – Ca vous chagrine ? »
« – Bah un peu… pour tout dire, j’avais espéré que notre rapprochement de la nuit dernière pourrait perdurer au-delà du simple cercle libertin… »
« – Désolée de vous décevoir mais depuis le début, je vous avais prévenu : je suis mariée et fidèle. »
« – Oui-oui, j’ai parfaitement capté le message : Hier, vous jouiez un rôle de composition, point-barre. Permettez-moi de vous complimenter : il était saisissant de réalisme ! Mais pas de soucis, on dira que vous êtes l’exception qui confirme la règle… »
« – A quel sujet ? »
« – Et bien disons qu’en règle générale, lorsqu’un homme met son sexe dans la bouche d’une dame, le tutoiement est ensuite de mise… mais bon, là non. »

Redoutable ! L’homme savait appuyer là où ça faisait mal !
Alexandra préféra ne pas répondre.

Heureusement, toujours aussi courtois et avenant, il ne laissa pas le temps au malaise de s’installer entre eux.
« – Alors, Dites-moi Alexandra – Je peux toujours vous appeler Alexandra ?- Qu’elle était donc cette fameuse question qui ne pouvait attendre la fin du week-end ? »

« – Oui, bien-sûr que vous pouvez m’appeler Alexandra… Ou même Alex, si vous voulez. Alors voilà : Cette nuit, avec Olivia, nous en sommes venu, un peu par hasard, à parler de la mort de Julia… »
« – Moui… Et ? »
« – Bien qu’elle soit ignorante de la procédure en cours, Olivia a une théorie assez… étonnante sur cette affaire… »
« – Ah tiens ! Et laquelle donc ? »
« – Et bien… c’est un peu délicat à expliquer mais elle semble persuadée que malgré les apparences, Julia a été tuée par un homme spécialisé dans ce genre de crime et qui agirait sur commande… pour punir les filles qui ne fileraient pas droit, en quelque sorte… Selon elle, cet homme bien connu du milieu se ferait appeler « le Tueur »… Le plus troublant et le plus incroyable serait sa manière de procéder afin de punir ou d’éliminer la fille sans laisser de trace… » Alex hésita avant de lâcher le morceau le plus improbable « … selon elle, il utiliserait son… membre viril comme d’une arme afin d’épuiser physiquement sa victime… Alors comme vous semblez connaître vous aussi le milieu, je me demandais si vous aviez entendu parler de ce fameux Tueur… »

Aucune réaction au bout du fil. Alex était consciente de l’énormité de l’hypothèse et elle aurait bien aimé voir la réaction de Xavier de visu et non au travers d’une ligne téléphonique.
Soudain, il éclata d’un long rire tonitruant avant de la railler :
« – Alors là ! Je savais que les flics allaient pécher leurs idées dans les théories les plus tordues mais celle-là, c’est la première !!
Oui, en effet, je connais cette histoire de Tueur mais je vous arrête tout de suite : Ce n’est qu’une légende urbaine parmi bien d’autres ! Le mec qui tue à grand coups de braquemart, franchement, vous pouvez y croire plus de deux secondes, vous ? »
« – Je sais que ça paraît complètement fou et sur le coup je me suis dit que cette fille affabulait mais en même temps, ça colle assez bien avec les constatations du légiste alors ça a trotté dans ma petite tête toute la nuit et ce matin, il fallait que j’en parle à quelqu’un pour en avoir le cœur net. »
« – Et bien, vous me voyez très flatté de savoir que c’est à moi que vous avez pensé en premier ce matin mais honnêtement, je serais vous, j’éviterais de faire part de cette hypothèse à vos supérieurs… sauf si, bien entendu, vous tenez absolument à vous ridiculiser en public. »
« – Non, vous avez sans doute raison… en tout cas merci de m’avoir écouté et encore désolée pour le dérangement. »
« – Il n’y a pas de quoi. Vous ne me dérangez jamais, belle Alexandra… et encore moins lorsque vous me permettez de me payer une bonne tranche de rigolade comme celle de ce matin ! »
« – Ne vous moquez pas, ce n’est pas très gentil… A une autre fois, alors. »
« – Avec plaisir ! Dès que vous retournez à l’Exotix, faites-moi signe : Je serai ravi de parfaire votre connaissance du monde libertin ! »

Alexandra raccrocha avec le feu aux joues.
La simple évocation de sa dernière escapade lui avait donné chaud.
Ce mec avait le don pour la mettre dans tous ses états !

Lundi matin.

Le week-end avait été un enfer !
Alexandra devait admettre que se retrouver au bureau était presque un soulagement… un comble !

Elle avait eu toutes les peines du monde à cacher son trouble à Yannick.
Celui-ci n’avait pas été dupe, il avait bien senti que quelque chose clochait. Il n’avait cessé de lui demander si ça allait, si elle avait un problème, si elle se sentait bien…

Elle avait eu beau donner le change et répéter que tout allait pour le mieux, que ce n’était que son satané boulot qui la bouffait, elle-même avait bien senti qu’elle n’était pas très convaincante.

Certes, l’excuse bateau du travail accaparant n’était pas totalement fausse puisque malgré les rires et les sarcasmes de Xavier Lebris, elle n’arrivait pas à se départir du sentiment qu’il y avait un truc, un je-ne-sais-quoi qui sonnait vrai dans l’hypothèse pourtant farfelue d’Olivia.

Mais il n’y avait évidemment pas que ça.

Elle n’arrivait pas à chasser de son esprit les images et les sensations de sa folle nuit de vendredi.
Dès qu’elle fermait les yeux, elle revoyait Xavier et Olivia dans leur étreinte passionnée, elle sentait encore sur sa peau les grandes mains de l’homme brun, elle gardait sur sa langue le souvenir de cette majestueuse colonne de chair palpitante.
Et à chaque fois, les papillons dans son bas-ventre s’en donnaient à cœur joie.

Stop ! Il fallait que ça cesse !
Ca l’avait tourneboulée tout le week-end et même là, assise seule devant son écran, elle sentait poindre une moiteur caractéristique entre ses cuisses.
Ne plus penser à ça, Alex ! Se concentrer sur le boulot, c’est ce que tu as de mieux à faire !

Et justement, la meilleure manière de se concentrer sur le boulot était de vérifier de façon objective et incontestable les dires de la demoiselle Olivia.
Ca ne lui prendrait pas trop de temps et ainsi, au moins, elle en aurait le cœur net : Légende urbaine ou hypothèse à creuser.
Si le résultat était un tant soit peu probant, elle pourrait alors en parler à Pierre avec suffisamment de billes pour ne pas passer pour une cruche.

***

Lorsque le téléphone sonna, à 11 h 45, Alexandra pesta.
Sa concentration était maximum. Les indices s’enchainaient et se corroboraient. Les impressions papier s’entassaient sur son bureau. Elle n’avait aucune envie d’être dérangée.

Son « Allo ! » fut sec et explicite : Qui que vous soyez, vous avez intérêt à avoir une bonne raison de me tirer de mes réflexions !
« – Bonjour lieutenant Verneuil, comment allez-vous en ce radieux lundi ? »
« – Xavier ! » Totalement prise au dépourvue, Alex ne put réagir que par une question idiote : « Comment avez-vous eu mon numéro direct ? »
« – Et bien c’est vous qui me l’avez donné, rappelez-vous : Lors de notre première rencontre… au cas où j’aurais d’autres éléments à vous communiquer en tant que témoin.
J’avoue que j’ai un peu honte de m’en servir à titre privé mais comme je tenais vraiment à vous joindre, je n’ai pas hésité bien longtemps. »
« – A titre privé ? »
« – Et bien, oui, je dois dire que depuis vendredi soir, je pense énormément à vous et je me demandais si nous ne pourrions pas déjeuner ensemble ce midi. »
Alex sentit son bas-ventre irradier instantanément. Elle bafouilla :
« – C’est que… j’ai beaucoup de travail… »
« – Trop pour manger ? Je vous promets que je ne vous accaparerai pas plus d’une heure. Une heure pour s’aérer la tête en bonne compagnie devant une salade du pécheur chez Pinto, à l’angle de la rue Cézanne, ça vous dit ? »
« – Euh… d’accord. »
« – Parfait ! Je passe vous prendre dans une demi-heure. A tout de suite ! »

Alex raccrocha encore un peu abasourdie, avec l’impression de ne pas avoir maitrisé la conversation.

Mais à la réflexion, avoir accepté cette invitation était une très bonne chose. Lebris commençait à prendre un peu trop ses aises avec elle. Voilà une bonne occasion de lui remettre définitivement les points sur les i.
En plus, elle avait l’intuition qu’elle était proche de toucher au but : Ses analyses avaient fait mouche.
Elle n’avait donc plus besoin de lui pour avancer.
Ce repas en tête à tête dans un lieu public serait donc une occasion parfaite de lui faire comprendre que non, il ne se passerait rien entre eux. Même s’ils avaient passé du bon temps, c’était uniquement pour les besoins de l’enquête et celle-ci était justement sur le point de se conclure.

Rassérénée par sa décision et ses bonnes résolutions, Alex profita des quelques minutes qui lui restaient avant son rendez-vous pour fignoler les derniers paramètres de sa recherche.
Et c’est l’esprit léger qu’elle appuya sur le bouton d’envoi au moment de quitter son poste de travail.

Alexandra se demandait encore comment elle en était arrivée là.
Tout était allé si vite, si précipitamment. Elle n’avait pas eu le temps de réfléchir, de prendre du recul, de se demander si elle avait vraiment envie de ça…
En même temps, il était difficile de nier ce que lui dictait son instinct : Oui, elle en avait terriblement envie !

Pourtant, tout avait commencé le plus normalement du monde.
Xavier Lebris l’attendait à deux pas du commissariat, debout sur le trottoir, appuyé contre le flan de son cabriolet noir… en toute décontraction, semblait-il mais l’homme avait la science du corps et de ses postures… Rien n’était laissé au hasard.

De même, il avait sciemment ignoré la main tendue pour lui proposer ses joues.
Le baiser avait été des plus chastes mais Alex se sentait déjà rougir.
Heureusement, la portière s’ouvrait déjà pour elle. Et elle avait pu cacher son émoi dans ses cheveux en baissant la tête pour s’installer.

Alexandra s’en voulait pour ses réactions de collégienne attardée. Quelle gourde ! D’autant qu’elle était quand-même là pour expliquer à cet homme qu’il fallait qu’il la laisse tranquille, qu’elle n’éprouvait rien pour lui et voilà qu’elle piquait un fard pour un rien !

Fidèle à sa nature discrète, Xavier n’avait pas relevé le trouble de la jeune femme. Aussitôt installé au volant il avait enchainé sur leur dernière conversation comme si celle-ci n’avait jamais été interrompue :
« – Alors, qu’a dit votre supérieur de votre petite hypothèse de tueur au braquemart ? » Avait-il demandé sur un ton ironique.
« – J’ai suivi votre conseil : je n’ai encore rien dit. » Avait-elle répondu, soulagée de revenir sur le terrain professionnel.
« – A la bonne heure ! Croyez-moi, vous avez pris la bonne décision… Ce n’est pas que je veuille vous imposer mon point de vue mais ça me contrarierait beaucoup que ma policière favorite soit la risée de ses collègues, tout ça parce qu’elle a écouté les élucubrations d’une prostituée en mal de sensations fortes. »
« Ah mais ne croyez pas que j’abandonne cette piste pour autant. Bien au contraire ! Et c’est pour ça que j’ai dit que je n’avais encore rien dit mais ça ne saurait tarder… »
« – Tiens donc ! Vous voilà bien mystérieuse tout à coup… Vous m’intriguez. »
Fière de pouvoir enfin remettre monsieur-je-sais-tout à sa place, Alex s’était un peu gargarisée :
« – Et bien, malgré vos moqueries, j’ai un peu creusé l’hypothèse d’Olivia… Oui, je sais, vous allez encore me dire que ce n’est qu’affabulations et délires paranos mais figurez-vous que d’après mes premières recherches, ce n’est pas si délirant que ça : J’ai découvert qu’un bon nombre de morts non élucidées dans le domaine de la prostitution comportent des similitudes troublantes avec l’affaire Julie Cénac… Suffisamment pour rouvrir l’enquête si Sophocle confirme cette première impression. »
« – Sophocle ? Qu’est-ce qu’un tragédien grec à avoir avec tout ça ? »
Alex avait émis un petit rire amusé.
« – Sophocle est un tout nouvel outil d’analyse inter-agences. Le plus puissant jamais mis au point en France. Ca vient en direct des USA ; Vous vous doutez bien que depuis le 11 septembre 2001, les amerloques son devenus assez tatillons sur les systèmes de détection des risques terroristes. Et bien Sophocle est issu directement de ces techniques de pointe en matière de renseignement. »
« – Ahh ! Très intéressant ! Et ça marche comment ? »
« – Oh, je vous passe les détails mais en gros, on entre tout un tas de mots clés dans un algorithme de recherche et le système vous sort tout ce qu’il a trouvé la dessus, par ordre de pertinence en fonction de vos mots clés. »
« – Ah oui, je vois, comme un méga Google alors. »
« – Exactement mais avec les bases de données de tous les organismes de lutte contre la criminalité. Et en plus, vous pouvez déterminer à l’avance le degré de précision des résultats, les paramètres d’élimination des données parasites, etc, etc. »
« – Wouah ! Impressionnant ! Si ça continue, vous n’aurez bientôt plus de boulot : Une petite séance de pousse bouton et hop : Le nom du criminel apparaît ! »
« – Oui, dans l’absolu, c’est ce que ça peut donner… à condition de bien paramétrer la recherche au départ et ça, c’est déjà un sacré boulot. Donc vous voyez, on n’est pas près d’être au chômage ! D’autant qu’en amont et en aval, il y a toujours un travail policier à effectuer : Récolte d’indices, interpellation, constitution du dossier… »
« – Ouais. Enfin on n’est quand-même pas loin de Big Brother, là. »
« – Ha ! Ha ! Ca vous fait peur ? »
« – Non ! Au contraire, l’honnête citoyen que je suis ne peut que se réjouir d’être bien protégé ! »
« – Je ne sais pas pourquoi mais je décèle une pointe d’ironie dans votre ton. »
« – Vous croyez ? » Avait-il répondu avec un sourire dans la voix. « En tout cas, vous êtes convaincue que votre « Sophocle » vous va solutionner votre enquête. »
« – La solutionner non, mais y contribuer, sans doute. »
« – Il ne vous reste plus qu’à finaliser le paramétrage de votre recherche, si j’ai bien compris. »
« – Exactement. C’est ce à quoi je vais m’employer cet après-midi. »
Alex n’avait pas cru bon d’informer Xavier qu’elle avait terminé le paramétrage juste avant de sortir et que le logiciel allait mouliner pendant sa pause déjeuner. Après-tout, Lebris n’avait pas besoin de tout savoir. Ce n’était pas lui qui menait l’enquête ! »
« – Nous voilà arrivés » Avait-il dit en changeant de sujet.
Alors qu’elle s’apprêtait à déclipser sa ceinture de sécurité, il avait posé sa main sur sa cuisse…
« – Tu est sûre d’avoir faim ? » Avait-il soufflé d’une voix suave.
Sans être formulée, la proposition était évidente.
Pétrifiée, elle s’était entendue répondre faiblement : « Non, pas très faim… »

Et voilà comment on se retrouve assise sur le lit d’une chambre banale dans un hôtel sans âme.

Alexandra savait qu’elle devait se secouer, dire non et sortir au plus vite de là.
Mais elle savait tout autant qu’elle n’en aurait jamais la force…

Absente, elle se laissa déshabiller comme une poupée.
Xavier était délicat, prévenant.
Ils furent bientôt nus tous les deux.
Puis Xavier fut sur elle… en elle.
Le plaisir explosa aussitôt. Un plaisir à la hauteur du sentiment de culpabilité qui l’étreignait.

***

C’était fort ! C’était bon.
Alex ne pensait plus à Yannick.
Alex ne pensait plus au boulot.
Seul comptait ce gros phallus qui lui labourait le ventre.

Elle resserra ses jambes sur la taille de son amant.
Elle voulait jouir encore et encore…

Alex Ne comptait plus.
Cinq ? Dix ? Quinze ?
Elle avait perdu le fil.
Les orgasmes se succédaient, déferlaient vague après vague, secouant son être et ravageant son corps.
Elle était en nage, hors d’haleine, des crampes commençaient à la prendre.
Mais Xavier poursuivait inexorablement ses lents mouvements de va et vient qui lui faisaient tant de bien.
Lui gardait son self-control, un sourire énigmatique sur les lèvres et à peine quelques goutes de sueur sur les tempes.
Cet homme était un dieu ! Un dieu du sexe !

Alex sentit son ventre se tendre… Bon sang, ça revenait encore !

Alex ne savait plus où elle était ni qu’elle heure il était.
Vidé, liquéfié, exténué, son corps n’était plus que soubresauts erratiques.

Xavier avait déjà éjaculé à deux reprises.
Mais cela n’avait en rien entamé son ardeur.

Elle l’aperçut en train d’enfiler un nouveau préservatif.
« – Attends ! Attends un peu que je récupère ! » Gémit-elle d’une voix rauque d’avoir trop crié.

Mais il ne l’écouta pas. Il se réinstalla entre ses jambes sans se départir de son éternel sourire.
« – Tu vas me tuer ! »
« – Mais c’est précisément le but de la manœuvre, très chère… Tes investigations t’ont emmenée bien trop près de la vérité… »

Il y avait longtemps qu’Alex avait renoncé à lutter.
Elle aurait peut-être pu, au début, quand elle avait brusquement réalisé qui il était vraiment.
Mais il était déjà trop tard. Son corps ne répondait plus, il réclamait une dose toujours plus forte d’endorphine.
Ses faibles efforts pour repousser l’homme n’eurent aucun effet.
Celui-ci continuait, implacable, alternant avec une froide régularité pénétrations anales et vaginales.
Comme s’il connaissait l’exact moment où l’orifice qu’il tourmentait n’en supporterait pas davantage.
Loque à peine humaine, elle se laissait tourner et retourner comme une poupée de chiffon. Seule une faible plainte hoquetante témoignait du rythme toujours aussi soutenu des coups de boutoir assassins.

Par deux fois, elle avait perdu connaissance.
Par deux fois son bas-ventre perclus de crampes l’avait tirée de sa confortable inconscience.

Alors qu’un terrible orgasme la terrassait, Alex se sentit partir à nouveau.
Elle était de plus en plus faible.
Cette fois, elle ne se réveillerait sans doute pas.

Alexandra flottait dans un univers blanc.
Blanc et silencieux… Cotonneux.
La mort était plutôt douce,finalement…

Puis la mise au net se fit. Elle reconnut une chambre d’hôpital.
Perdue mais rassurée, elle replongea dans ses rêves éthérés.

Pierre contemplait sa coéquipière.
Même alitée dans une froide chambre d’hôpital, Alex irradiait d’un charme indéniable.
C’était quand-même dommage que ça ne l’ai pas fait entre eux deux.

La belle ouvrit un œil paresseux… puis l’autre.
Elle lui adressa un petit sourire fatigué qui se transforma en grimace lorsqu’elle voulut parler.
« – Ca fait longtemps que tu me regardes dormir ? »
« – Une paire d’heures, oui. »
« – Depuis combien de temps je suis là ? »
« – Deux jours. »
« – Ah ouais ! »

Elle avait la voix cassée, quasi aphone. Chaque mot semblait une épreuve.

« – Tu avais besoin de repos. »
« – J’suis pas morte. »
« – De toute évidence ! »
« – Comment ça se fait ? »
« – On t’a retrouvée à temps. »
« – Qui ? »
« – Moi. »
« – Lebris ? »
« – Sous les barreaux. »
« – Comment t’as fait ? »
« – Sophocle. »

???

« – J’avais besoin de toi pour un renseignement mais tu n’étais pas là. Tu avais dit à Francis que tu partais déjeuner mais à 14 heures 30 tu n’étais toujours pas revenue, sans prévenir, ça ne te ressemble pas.
Alors j’ai demandé au planton. Il t’a vu partir avec un bellâtre dans un cabriolet… Alors j’ai compris qu’il ne fallait pas que je m’inquiète, que le beau Xavier avait fini par faire tomber tes dernières réticences…
Seulement j’avais toujours besoin de mon renseignement.
Alors je suis allé sur ton poste… Une chance que tu n’ais pas changé ton mot de passe depuis la dernière fois que j’en avais eu besoin, sinon, je crois que je serais arrivé beaucoup trop tard…
J’ai découvert ta recherche Sophocle… et son résultat puisqu’elle était arrivée à son terme pendant ton absence.
Ca m’a intrigué. Alors j’ai regardé plus en détail…
Je n’ai pas tout compris, tes items de recherche étaient vraiment bizarres… j’imaginais que c’était en corrélation avec ton air mystérieux en sortant de la boite, l’autre nuit… par contre, le résultat était limpide, j’ai compris qu’il y avait un gros hic : Lebris a un passé beaucoup plus chargé que ce que nous soupçonnions au départ et il arrive dans le peloton de tête des occurrences de ta recherche.
Ca a aussitôt allumé tout un tas de voyants rouges dans ma tête : Ton air mystérieux, tes soupçons sur un individu et ta recherche cachée qui matche Lebris, le fait que tu sois précisément partie avec lui et que tu ne sois toujours pas revenue au bout de trois heures… Il ne m’en fallait pas plus pour faire sonner le clairon. »
« – Comment vous m’avez retrouvée ? »
« – Grace à ton mobile. Heureusement que tu l’avais mis en mode silencieux sans l’éteindre… Une simple triangulation des balises a pointé un petit hôtel isolé… A partir de ce moment là, ma seule préoccupation a été d’arriver à temps… Et pour tout dire, vu ton état quand on t’a récupérée, j’ai cru un instant que nous avions échoué. »

Pierre réfréna un frisson glacial, une image s’imposait à son esprit : Lebris ne les avaient pas entendu arriver. A leur entrée dans la chambre, il sodomisait avec une rare violence le corps inanimé de sa victime.

Mais Alexandra n’avait pas besoin de connaître tous les détails. Le principal était qu’elle était sauve et le coupable arrêté.

« – Yannick ? »
« – On l’a prévenu, bien-sûr. Il est ici. Je lui ai dit que je veillais sur toi et qu’il pouvait aller manger un bout en attendant que tu te réveilles. »

Pierre lut dans les yeux d’Alex la question muette.

« – Non, ne t’inquiète pas : Je lui ai juste dit que tu étais tombée dans un piège et qu’un détraqué t’avais malmenée… Le pauvre s’imagine déjà suffisamment d’horreurs comme ça. Il n’a pas besoin de connaître toute la vérité. Si tu veux la lui dire plus tard, libre à toi mais à mon avis, il est des vérités qu’il vaut mieux savoir taire, parfois. »

Alexandra ferma les yeux.

« – Merci. »
« – De rien. En tout cas, attends-toi à te faire sacrément dorloter dans les semaines à venir ! »

Un faible sourire apparut sur les lèvres de la jeune femme.

« – Et Lebris, il a parlé ? »
« – Les gars sont encore en train de le cuisiner. Selon ses premiers aveux, il a eu peur que tu le démasque alors il a… « improvisé » ce guet-apens dans cet hôtel qu’il avait déjà utilisé pour d’autres « contrats » et dont il savait le gérant peu regardant. Ledit gérant va d’ailleurs devoir nous rendre quelques comptes car il semble peu probable qu’il n’ait rien entendu de ce qu’il se passait dans la chambre… »
« – Bah ! J’ai même pas crié au-secours. »
« – N’empêche, c’est pas une raison ! »
« – Il a dit quelque chose sur Julie Cénac ? »
« – D’après les premières infos qu’il a bien voulu nous donner, la fille aurait découvert fortuitement que son député de patron et amant trempait dans une affaire de prostitution organisée. Celui-ci avait déjà eu recours à Lebris pour divers services que je n’ose imaginer et il lui aurait demandé la faire taire définitivement parce qu’elle commençait à fouiner un peu trop.
Comme elle était déjà addict au sexe, ils ont estimé que faire passer ça dans une boite à partouze, ça noierait le poisson… Et ils y seraient parfaitement parvenus sans le flair et la pugnacité de la plus brillante des fliquettes ! »
« – Ne m’appelle pas comme ça, s’il te plait, ça me rappelle de mauvais souvenirs. »
« – Comme tu veux, excuse-moi. Ne t’en déplaise, c’est bien grâce à toi qu’on l’a eu… et sans doute aussi un peu grâce à sa trop grande confiance en lui : J’imagine que c’était parce qu’il était sûr de son impunité qu’il s’est présenté de lui-même à nous. Ainsi, l’air de rien, il se tenait au courant de l’avancée de notre enquête. Il a même su habilement nous faire bifurquer sur l’histoire de la prostitution en club. »
« – Sauf qu’il n’avait pas prévu qu’Olivia me renverrait directement sur lui. »
« – Olivia ? »
« – La prostituée avec laquelle j’ai parlé vendredi. »
« – Ah oui ! En tout cas, j’en connais un qui va être rudement content. »
« – Qui ça ? »
« – Davoust pardi ! Lui qui voulait éviter une affaire puante, il va être servi ! »
« – Pauvre chou ! »
« – Tiens revoilà ton homme. Je lui laisse la place. N’oublie pas de te reposer. D’après le médecin, tu vas avoir droit à au moins deux semaines de repos. Je ne veux pas te voir pointer ton joli petit nez avant ! Compris ? »
« – Compris chef. »

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One Response to Brigade des mœurs (2) – Zob in club

  1. Eric 30 avril 2021 at 08:15 #

    Très bon texte, bien écrit et surtout hyper excitant, on se met immediatement dans la peau d’Alexandra, hummmm…

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